Eau trouble : Eau-de-mort
Cinéma

Eau trouble : Eau-de-mort

Avec Eau trouble, remake américain d’un film japonais à succès, le cinéaste brésilien Walter Salles plonge dans le fantastique.

Le cinéma japonais a toujours eu un faible pour les histoires de fantômes. Ce sous-genre du fantastique est même une sorte de figure imposée pour les cinéastes nippons, de Masaki Kobayashi (Kaidan) à Kiyoshi Kurosawa (Seance, Kairo), en passant par Oshima Nagisa (L’Empire de la passion) et Akira Kurosawa (Dreams). Mais jamais les revenants nippons n’avaient été aussi populaires que depuis le triomphe international du film Ringu d’Hideo Nakata. Sans trop exagérer, on peut affirmer que cette œuvre est à l’origine de la vague actuelle du J-horror, véritable âge d’or du cinéma fantastique japonais.

Comme ils en ont l’habitude, les Américains ont décidé de surfer sur cette vague sans trop se mouiller, c’est-à-dire en distribuant clandestinement les grands succès (Ringu, Ju-On), pour ensuite miser ouvertement sur de luxueux remakes (The Ring, The Grudge). Nakata a lui-même été invité à plonger en tournant The Ring 2, lequel, ironiquement, ressemblait étrangement à son propre film japonais Eau trouble. La boucle est maintenant bouclée, puisque voici le remake américain de ce film, tourné celui-là par un cinéaste brésilien. On s’y retrouve?

Pour une œuvre tournée au pays du soleil levant, Eau trouble de Nakata (récemment sorti en DVD) est un film drôlement pluvieux. La flotte totale, du début à la fin, pour raconter l’histoire triste et angoissante d’une mère récemment divorcée qui emménage dans un appartement lugubre avec sa petite fille. À mi-chemin entre le Polanski obsessionnel du Locataire et son propre Ringu, le film de Nakata est un thriller psychologique et fantastique subtil et allusif à souhait.

Comparé aux autres films hollywoodiens du même genre, le remake américain s’avère un film d’horreur raffiné et sobre. Mais les effets de terreur et de suspense y sont tout de même plus forcés et appuyés que dans son modèle japonais. Et si l’intrigue sait ménager un climat de mystère efficace, l’angoisse demeure moins palpable que dans l’original. Tout de même, grâce au jeu à la fois intense et sensible de Jennifer Connelly, on se laisse prendre à cet étrange mélodrame surnaturel sur les frayeurs d’une mère démunie qui lutte pour conserver la garde de sa fillette au moment même où celle-ci se met à "voir des morts".

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