Rémy Girard : Rémy le bien-aimé
Cinéma

Rémy Girard : Rémy le bien-aimé

Rémy Girard, de retour de Prague où il tournait Human Trafficking de Christian Duguay, nous parle de ses nombreux projets et fait le point sur sa carrière internationale. Rencontre avec un sympathique boulimique de cinéma.

Lors de la grande première montréalaise d’Aurore, de Luc Dionne, le public vibrait dès qu’apparaissait Oréus Mailhot (Rémy Girard), celui qui a bien failli sauver la vie de la petite martyre (Marianne Fortier). Chacune de ses répliques, lancées avec vigueur, était accueillie par des éclats de rire et des signes d’acquiescement, et lorsque Mailhot a invectivé le curé Leduc (Yves Jacques), un tonnerre d’applaudissements s’est fait entendre dans la Place des Arts:

"Là, je les ai eus! lance Girard, le regard brillant. À la fin de la projection, des gens d’un certain âge venaient me féliciter pour ce que j’avais osé lancer à la face du curé. Au fond, ce n’est pas à moi qu’ils s’adressaient, mais à Oréus. Pourtant, Oréus est fautif lui aussi, il n’a pas agi à temps; d’ailleurs, il s’en est voulu toute sa vie d’être arrivé trop tard. Ce que je trouvais intéressant dans ce personnage, c’était son orgueil, une façon pour lui de fuir la réalité. Ça fait vraiment très plaisir de voir que les gens croient à ton personnage; dans le métier, on appelle ça "scorer", mais j’ai été pas mal étonné de la réaction."

ACTEUR CHÉRI

Pas de doute, l’acteur a l’une des plus grosses cotes d’amour au Québec. Pourtant, celui que les passants appellent simplement Rémy sait que la gloire peut être éphémère, et ce, même si son C.V. est long comme le bras:

"Je touche du bois, car je me considère très chanceux et très privilégié. Les médias disent que l’on me voit trop, mais si je me fie à la réaction des gens, on n’est pas encore tanné de moi! […] C’est une bonne chose que je n’aie connu le succès qu’à partir de 35 ans. Cela dit, je travaille beaucoup et je me dirige de plus en plus vers les personnages de composition."

Ainsi, pour les besoins d’une émission spéciale réalisée par Christian Duguay pour la chaîne Lifetime, Human Trafficking, Girard incarnera un Russe qui infiltre la mafia afin de retrouver sa fille (Laurence Lebœuf) tombée dans l’enfer de la prostitution:

"La série, qui met entre autres en vedette Robert Carlisle, Mira Sorvino, Donald Sutherland et Isabelle Blais, nous fait découvrir l’univers de la traite des Blanches et du trafic d’organes. C’est terrible de savoir que ce marché est le troisième plus lucratif au monde, après la drogue et les armes à feu. Apprendre le russe et avoir à parler anglais avec l’accent russe n’a pas été facile! Mon personnage est un homme introverti; ce n’est pas le genre de personnage avec lequel je suis le plus à l’aise, donc je posais beaucoup de questions au début. Le danger avec ce genre de personnage, c’est de devenir plate; il faut conserver une certaine drive sans trop en faire."

MY DINNER WITH STEVEN

Après avoir remporté un prix à Cannes pour son rôle dans Les Invasions barbares de Denys Arcand, Marie-Josée Croze a vu sa carrière internationale prendre son essor. Il en a été tout autrement pour l’interprète de l’hédoniste Rémy, qu’on avait invité par erreur à la remise des prix parce que Jacques Jacob était persuadé que Girard recevrait la palme. L’acteur affirme sans amertume que les Français ne s’intéressent pas à lui parce qu’ils protègent leur marché. Et les Américains, alors?

"Lorsque les journalistes ont su que j’avais dîné avec Steven Spielberg, ils en ont fait une nouvelle! Oui, Spielberg m’a approché pour jouer un Français, mais je n’ai pas eu le rôle parce que les coproducteurs européens voulaient un acteur français. C’était extraordinaire, nous avons beaucoup parlé de ses films, dont Duel; je lui ai demandé comment il avait tourné certains plans de Raiders of the Lost Ark et de Saving Private Ryan", relate Girard avec émotion.

Et la carrière internationale, alors?

"C’est un travail de fond qui se fait petit à petit et qui commence à porter ses fruits. Je travaille en France, au Canada, aux États-Unis et j’ai un projet avec les Italiens, mais je n’ai pas de carrière internationale… sauf que je commence à découvrir tout un réseau où plusieurs projets se tournent."

PAPA BOUGON AU CINÉMA?

Vous voulez savoir ce qu’il adviendra de Mao (Rosalee Jacques)? Eh bien, même son papa ne le sait pas! De retour pour une troisième saison de 13 épisodes, Les Bougon, c’est aussi ça la vie, téléroman décapant de François Avard et Jean-François Mercier, devait se terminer au printemps dernier:

"On a vraiment travaillé fort pour convaincre ces deux têtes de cochon; j’ai dit à Avard que je lui enverrais les Hell’s s’il ne voulait pas continuer (rires). Les gars nous disaient qu’ils n’avaient pas d’idées, et moi, je n’étais pas sûr de ça."

"Avard est un brillant dialoguiste et c’est ce qui fait la qualité de la série, poursuit-il. Quant aux Bougon au cinéma, je préférerais le plus tard possible; je pense qu’ils devraient d’abord faire quelques saisons de plus, et s’ils sont épuisés après ça, faire un film. Je ne suis pas sûr qu’il faille faire un film avec tout."

SEUL SON BARBIER LE SAIT

Écrit par Ken Scott et réalisé par Charles Binamé, Maurice Richard sera plus qu’un film sur le hockey. Girard y tiendra le rôle de Tony Bergeron, barbier du Rocket, interprété par Roy Dupuis:

"Entendons-nous, c’est un caméo que j’ai dans ce film, une journée et demie de tournage. J’ai trois scènes seulement, mais trois hosties de belles scènes! J’avais d’abord refusé parce que j’étais pris ailleurs, mais Binamé a insisté pour que je lise le scénario. Le film, prévu pour novembre, tourne beaucoup autour de l’émeute de 1957, le premier geste de colère de notre peuple. Je crois que le film est plus axé sur l’icône que sur le joueur de hockey."

DANS LE LIVRE À STAN

En ce moment, Rémy Girard chausse les patins de Stan, qui a quitté sa brasserie pour devenir propriétaire d’un magasin de sport, afin de jouer dans Les Boys en prolongation de Georges Mihalka, projet pour lequel l’acteur a dû se faire tirer l’oreille: "L’idée d’une troisième suite ne m’emballait pas, mais à un moment donné, le plaisir de retrouver cette gang-là a été plus fort; Les Boys ont quand même presque 10 ans. Est-ce qu’on étire la sauce? On verra bien…"

CINÉMA, CINÉMAS

Ayant décidé de faire le plus possible de cinéma, l’acteur, qui a tourné avec Emmanuelle Béart dans le téléfilm Les Trois Mousquetaires l’an dernier, désire susciter des projets en ce sens:

"Le cinéma, c’est ce que j’aime le plus faire dans la vie. Évidemment, ça peut être frustrant; tu peux parfois travailler comme un fou et bang! le projet tombe. Mais c’est un risque que j’aime. J’ai un beau projet avec Roger Cantin, qui n’a malheureusement pas passé. J’ai des idées plein la tête; j’aimerais pouvoir réunir un réalisateur, un scénariste et un producteur afin de les concrétiser. J’ai parlé d’un projet à Roy (Dupuis) qui s’est montré intéressé… On verra bien, moi je reste cool… même si je pense toujours que ça va s’arrêter après le prochain film (rires)."