Haute Tension : Carnaval gore
Cinéma

Haute Tension : Carnaval gore

Haute Tension se veut un hommage aux films d’horreur américains des années 70, avec en prime un raffinement bien français. C’est particulièrement sanguinolent, d’un gore outrancier et d’une violence éprouvante… Mission accomplie, quoi!

Deuxième réalisation d’Alexandre Aja (Furia), Haute Tension est un film aux moyens modestes qui parvient tout de même à créer de façon intelligente, au-delà de l’effet gore dans lequel il s’élance à fond de train, un climat de tension assez éprouvant et un malaise qui s’installe jusque dans les os. Et depuis qu’un gros distributeur américain s’y est intéressé, après le Festival de Toronto, petit film est devenu phénomène.

Méthodiquement, Aja installe le récit dans un climat qui, d’entrée de jeu, crée l’anxiété. Deux lycéennes, Marie (Cécile de France, tonique) et Alexia (Maïwenn, criarde à souhait), s’installent dans la maison de campagne des parents de cette dernière pour préparer leurs examens. Les parents d’Alex et son petit frère les accueillent avec bonheur dans cet endroit qui sent bon l’amour et la bonne humeur. Mais dès la première nuit, c’est l’horreur: un étranger pénètre dans la maison et massacre tous ses occupants (y compris l’enfant – détail dont on aurait pu se passer), sauf Alex qu’il emmène avec lui, et Marie qui réussit à se cacher. Malgré sa terreur, Marie est résolue à sauver son amie et à suivre l’homme dans la nuit, jusqu’à son refuge.

Le reste de l’histoire est un terrifiant jeu du chat et de la souris bien construit et efficace. Les scénaristes Aja et Grégory Levasseur parviennent à jouer avec le pauvre spectateur crispé dans son fauteuil en maintenant constamment la pression. La finale et son retournement font déjà beaucoup jaser, en raison de raccourcis narratifs difficiles à justifier (du moins d’un point de vue théorique). Mais on ne va pas voir un slasher pour sa logique narrative!

Et pour un slasher, c’en est tout un! Aja (qui aura 27 ans ces jours-ci) nous en met plein la vue et les oreilles avec un bon équilibre de gros plans et de hors-champs. Corps décapités, mutilés, transpercés, égorgés… le tout sur fond d’atroces hurlements, de fracas d’os broyés, de chair déchiquetée et de bruits de corps qu’on éviscère. Brrr… Les adeptes connaissent, les autres sauront éviter.

Le tout culmine vers l’inévitable et carnavalesque massacre à la tronçonneuse. C’est une orgie de sang et d’horreur qui, dans le contexte du récit et des films du genre (et de l’incontournable rapport éros/thanatos), n’est rien d’autre que l’orgasme du meurtrier.

Mais cet hommage est aussi un clin d’œil. Haute Tension a ses moments de caricature et d’humour (noir, bien sûr). C’est un rire qui, cependant, ne se prolonge jamais bien longtemps.

On sort de ce film sous haute tension, secoué par tant de violence et ébranlé d’avoir applaudi en silence lorsque le meurtrier se fait asséner avec furie les coups fatidiques qui l’enverront au plus profond de l’enfer dans d’atroces souffrances (bien fait pour lui!).

Mais c’est justement dans cette ambiguïté morale que réside l’étrange fascination que l’on ressent pour l’horreur.

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