Jarhead : Mendes s'en va-t-en-guerre
Cinéma

Jarhead : Mendes s’en va-t-en-guerre

Pour Jarhead, le réalisateur d’American Beauty met en scène les tribulations d’un groupe de marines dépêchés dans le golfe. Dommages collatéraux à prévoir.

Plaçant son talent au service d’une esthétique et d’un récit qui lui sont étrangers, le réalisateur anglais Sam Mendes a voulu réaliser un film de guerre "comme on n’en avait encore jamais vu". Une ambition qui, bien que noble, s’avère à tout le moins difficile à honorer. Certes, le cinéaste s’est intéressé à une page d’histoire – lire: la guerre du Golfe – qu’Hollywood n’a pas encore daigné exploiter (à titre comparatif, rappelons que le 11 septembre a déjà engendré son lot de films…). Partant, on se serait attendu à ce que Mendes propose une lecture originale des événements, qu’il les place dans un contexte éclairant. Au contraire, le réalisateur s’efface derrière un récit plutôt classique qui passe plus de temps à disséquer les bibittes du soldat lambda qu’à déverrouiller le fatras géopolitique caractérisant le conflit.

Basé sur le best-seller du même titre écrit par l’ex-soldat Anthony Swofford, Jarhead suit le parcours d’un jeune marine (Jake Gyllenhaal, inégal) qui, au terme d’un entraînement rigoureux, est dépêché dans le golfe avec sa compagnie de francs-tireurs. Là-bas, le groupe se met en mode qui-vive. En l’absence d’ennemi à combattre, le sergent Siek (Jamie Foxx) occupe ses ouailles à diverses tâches barbantes. Sous un soleil d’enfer, nos combattants commencent à sombrer qui dans la peur, qui dans la morosité.

Après une entrée en matière nerveuse (non sans rappeler l’ouverture de Full Metal Jacket), le rythme s’alanguit sensiblement. Réglant son rythme sur le surplace des soldats piaffant dans le désert, Jarhead joue alors la carte de l’attentisme. En l’absence de déflagrations sur le terrain, le scénario cherche des mèches à allumer dans la vie privée des garçons. Cela nous vaut quelques épisodes convenus à haute teneur en testostérone. Écrasée par une lumière très crue, la photographie de Roger Deakins paraît excessivement délavée. Ce sont les séquences tournées de nuit qui nous valent les images les plus colorées.

Enfin, citant ironiquement d’autres réalisations guerrières incontournables (The Deer Hunter, Apocalypse Now…), Jarhead multiplie les renvois d’ascenseur aux anciens combattants. Et Mendes voulait faire les choses autrement? Remarquez, il a peut-être réussi à un titre: cultivant l’ambiguïté, son film de guerre est à la fois pamphlet et dithyrambe.

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