Syriana : Or noir
Syriana, de Stephen Gaghan, nous plonge dans les arcanes de l’industrie pétrolière en levant le voile sur ses collusions avec le pouvoir politique, l’espionnage et le terrorisme.
George Clooney
incarne un agent de la CIA pour qui le Moyen-Orient n’a plus de secrets. Ses patrons lui ont confié la mission d’assassiner un prince du golfe Persique (Alexander Siddig) dont les politiques menacent la stabilité de l’industrie pétrolière américaine. Il s’agit d’une des nombreuses intrigues enchevêtrées de ce scénario tiré du livre d’un ancien agent de la CIA, Robert Baer.
Pour venir brouiller encore davantage les cartes, le film suit aussi le parcours d’un analyste américain de l’énergie (Matt Damon) qui est amené à tirer avantage du décès accidentel de son fils pour conclure un partenariat d’affaires avec le prince. Sans parler du récit parallèle d’un jeune ouvrier pakistanais (Mazhur Munir) qui se laisse endoctriner par un groupuscule terroriste et d’un avocat de Washington (Jeffrey Wright) chargé d’enquêter sur la fusion entre deux pétrolières américaines.
Il s’agit d’un programme très chargé, déballé à l’écran au pas de charge par un cinéaste qui pousse constamment le spectateur dans le dos. On a souvent l’impression de parcourir un labyrinthe narratif dont les corridors sinueux sont flanqués de pièces où se déroulent des drames et des intrigues dont on est témoin uniquement à la volée, par des portes entrouvertes. Vite, vite, il faut foncer… Avec un matériel aussi dense et touffu, le film aurait dû être deux fois plus long pour permettre au récit de respirer et au suspense de s’installer.
Impossible pourtant de ne pas être admiratif devant cet exemple trop rare de cinéma hollywoodien politisé, conscientisé et nettement critique envers l’hégémonie américaine, les crimes odieux de la CIA et les magouilles des barons de l’or noir.
Réalisé par Stephen Gaghan (Abandon) dans un style sans surprise, mais aussi sans bavure, le film contient quelques passages mémorables qui vont sans doute faire beaucoup jaser. Vous souvenez-vous du célèbre discours prononcé par Michael Douglas dans Wall Street sur les vertus de l’appât du gain ("greed is good")? Il y a dans Syriana une scène semblable où un personnage se livre avec ferveur à une défense en règle de la corruption comme une des grandes valeurs américaines. On n’a pas fini d’en entendre parler…
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