Munich : La loi du talion
Cinéma

Munich : La loi du talion

Avec Munich, Steven Spielberg se retrouve plus que jamais déchiré entre son statut d’amuseur public et ses ambitions d’artiste.

Contrairement aux autres films historiques de Steven Spielberg (Schindler’s List, Amistad, Saving Private Ryan), Munich évoque un fait relativement récent dont les répercussions se font sentir encore aujourd’hui, puisqu’il s’agit d’un des événements les plus marquants du conflit israélo-palestinien. Le film raconte l’expérience d’un agent du Mossad (Eric Bana) engagé dans le plus grand secret par la première ministre Golda Meir pour diriger une petite équipe d’assassins dont la mission consiste à éliminer les terroristes ayant planifié la prise d’otages israéliens lors des Jeux de Munich en 1972.

Aux côtés de Bana, on retrouve Mathieu Kassovitz dans le rôle d’un fabricant de bombes, Daniel Craig (le futur James Bond) dans la peau d’un assassin sud-africain, Hanns Zischeler dans le rôle d’un faussaire allemand et finalement Ciaran Hinds dans celui d’un nettoyeur des scènes de meurtre. Au début du film, ils forment une équipe à la Mission: Impossible, fonctionnant comme une horlogerie suisse. Puis, lentement, les questionnements moraux sur le sens profond de leur mission, ainsi que des doutes quant à la loyauté de leurs informateurs, viennent brouiller les cartes et complexifier l’intrigue écrite par Eric Roth (Forrest Gump) et Tony Kushner (Angels in America)

Avec Munich, Spielberg se retrouve plus que jamais plongé, pour ne pas dire enchaîné, dans le paradoxe au creux de sa double position d’auteur et d’amuseur. Il signe ici un film hautement politique sous la forme d’un thriller d’espionnage qui joue parfois la carte du suspense hitchcockien avec une redoutable conviction.

Le film se veut à la fois une réflexion sur les thèmes de la vengeance, de la loyauté, de la culpabilité et de l’engrenage infernal de la violence, et un divertissement cathartique sur le spectacle engendré par l’interaction de tous ces thèmes. Visiblement conscient du terrain glissant sur lequel il évolue, Spielberg joue de prudence en s’imposant un style rigoureux et austère qui finit par miner volontairement l’aspect ludique du suspense, sauf dans quelques rares séquences. Le résultat est un film sec, mécanique, froid, admirablement filmé, mais que l’on regarde avec plus d’admiration que de passion.

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