Rétrospective Jean Pierre Lefebvre : Nul n'est prophète en son pays
Cinéma

Rétrospective Jean Pierre Lefebvre : Nul n’est prophète en son pays

Du 18 janvier au 15 février, Jean Pierre Lefebvre est à l’honneur à la Cinémathèque québécoise. Rencontre avec le cinéaste.

Au fil des années, Jean Pierre Lefebvre a souvent été célébré en Europe et au Canada anglais, mais il y a plus de 30 ans qu’une rétrospective de ses films n’a été organisée au Québec. "Ça fait du bien de revenir à la maison", avouait-il au cours de l’entretien qu’il nous a accordé entre les murs de la Cinémathèque québécoise, là même où l’intégrale de son œuvre est présentée jusqu’au 15 février.

Les cinéphiles voudront bien sûr voir ou revoir Les Dernières Fiançailles (généralement considéré comme son chef-d’œuvre) et Les Fleurs sauvages (Prix de la critique internationale à Cannes en 1982), mais on leur recommande aussi de s’aventurer vers certains films moins connus mais tout aussi fascinants, particulièrement Les Maudits Sauvages, un récit "presque historique" magnifiquement photographié par Jean-Claude Labrecque dans lequel Pierre Dufresne (Fardoche pour la génération Passe-Partout) joue un coureur des bois qui ramène une Amérindienne dans un Montréal quelque part entre 1670 et 1970. "C’est un film-culte pour beaucoup de gens, mais récemment il a été refusé par Télé-Québec, sous prétexte que c’est un film que les Québécois ne pourraient pas comprendre actuellement. Je trouve que c’est le contraire, c’est un film très cher à mon cœur."

Tout au long de sa carrière, Lefebvre a dû essuyer les refus et les échecs chez lui alors qu’on l’encensait à l’étranger. "Quand Les Dernières Fiançailles est sorti ici, explique le cinéaste, le film a été détruit par tout le monde. Puis, après le succès en Europe, la critique a changé d’idée. Curieusement, ç’a été le sort de beaucoup de mes films. Le Révolutionnaire a été refusé à grands éclats de rires par le Festival du cinéma canadien en 1965, sauf qu’un mois plus tard, il gagnait le Premier Prix du jeune cinéma à Pesaro en Italie."

On doit aussi à Lefebvre Jusqu’au cœur (avec Robert Charlebois et Mouffe), Q-bec My Love et Mon œil, qu’il estime être "le film le plus libre qui ait jamais été fait au Québec". Plus récemment, il a réalisé la série vidéo L’Âge des images, le téléfilm Le Manuscrit érotique et le documentaire intimiste Mon ami Michel. De plus, il est de retour à la présidence de l’Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec, poste qu’il avait déjà occupé dans les années 70. "Je suis revenu parce que je trouvais qu’il n’y avait plus de mémoire, et aussi parce que ça fait du bien, l’altruisme. Pendant qu’on s’occupe des autres, on s’apitoie moins sur son sort."

C’est qu’à l’instar des réalisateurs qu’il représente, Lefebvre se retrouve à la merci des producteurs et distributeurs, malgré son expérience et son évident amour du septième art. "Si le ciel existe, confie-t-il, pour moi, c’est un plateau de tournage… Et j’ai hâte de tourner." En attendant son retour derrière la caméra, imminent on l’espère, voici la chance de redécouvrir la filmographie d’un géant méconnu du cinéma québécois, qui apprécie beaucoup lui-même cette belle occasion. "Actuellement, je réapprends ce que j’ai fait, comment je l’ai fait, pourquoi ça a fonctionné ou pas, pourquoi les gens ont réagi comme ça. C’est l’fun!" de conclure Lefebvre.

Du 18 janvier au 15 février, à la Cinémathèque québécoise
www.cinematheque.qc.ca