FFM Alanis Obomsawin : Les héros de mon enfance
Cinéma

FFM Alanis Obomsawin : Les héros de mon enfance

Au FFM, Alanis Obomsawin présentera son tout nouveau documentaire, Waban-Aki: peuple du soleil levant. Rencontre avec une cinéaste engagée et fascinante.

"Nous sommes à Odanak, une réserve abénaquise située en bordure de la rivière Saint-François, dans le Sud du Québec…" Il ne suffit que d’une phrase pour transporter le spectateur vers le village natal d’Alanis Obomsawin, cinéaste autochtone émérite, dont la filmographie compte quelque 24 oeuvres, la plupart desquelles ont été primées. Son dernier opus, Waban-Aki: peuple du soleil levant, est un hommage au lieu de son enfance, et aux êtres qui y sont restés. C’est en proie à une forte émotion que la cinéaste, âgée de 74 ans mais ne les faisant guère, nous parle du projet: "Odanak, c’est l’endroit où j’ai été élevée. Ça faisait plusieurs années que je pensais qu’il fallait absolument faire un documentaire chez nous. Et, comme le temps passe… j’ai décidé de le faire maintenant. Et tout en tournant ce film, j’en ai fait un autre à travers lui: Sigwan, un film pour enfants qui est sorti l’an dernier."

Même si Waban-Aki prend davantage la forme d’un hommage, madame Obomsawin y insère néanmoins des séquences d’ordre plus politique, dont celle faisant référence à cette fameuse loi C-31 qui, 20 ans après son instauration, continue de réduire les enfants de couples métissés au rang de simples numéros: "Je reviens très souvent à Odanak, j’ai donc pu remarquer qu’il y avait encore beaucoup de problèmes concernant le statut des femmes. Et, comme résultat, les enfants s’appellent par numéros: toi, t’es un 6-1 (enfant dont les deux parents ont le statut autochtone), toi, t’es un 6-2 (enfant dont un seul parent a le statut)…"

Plus ça change, plus c’est pareil? Pas tout à fait. La cinéaste, qui est aussi chanteuse et artiste, croit que la lutte n’est jamais vaine: "Avec mes films, je peux renseigner les gens sur la situation, sur l’histoire… Savoir d’où on vient, qui sont nos ancêtres, ce qu’ils ont fait… tout cela est très important et aide à forcer les changements. Il y a même certains films qui ont réussi à faire modifier les lois. Pour moi, ces films représentent le pouvoir."

Fort, il l’est assurément, ce film. Réminiscence touchante d’un temps passé où les traditions étaient bien plus respectées qu’aujourd’hui, Waban-Aki offre un défilé de personnages qui parlent de l’immense fierté, mais aussi de l’horrible injustice, qu’entraîne trop souvent la condition autochtone. Ainsi, cette femme qui raconte avoir été obligée de vendre ses droits, pour huit dollars (!), le jour où elle s’est mariée avec un Blanc. Ou encore cet homme, qui nous parle de la méchanceté dont il a été victime tout au long de son enfance, uniquement parce que ses parents étaient un couple métissé.

Mais, malgré le sentiment de mélancolie qui émane des images, Odanak nous apparaît comme un endroit unique, un trésor et un héritage inestimables qu’il ne faut pas oublier: "Ce n’est plus le même visage que lorsque j’étais enfant, c’est triste, confie la cinéaste avec émoi. Mais il y a beaucoup de choses qui se passent, les Abénaquis ont des avocats… c’est une bataille continue."

Le jeudi 31 août à 19 h 20 au Quartier Latin
Deux représentations simultanées, l’une en français, l’autre en anglais
www.ffm-montreal.org