Catch a Fire : La nuit du chasseur
Catch a Fire, de Phillip Noyce, raconte la véritable histoire de Patrick Chamusso, combattant des droits de l’homme sous le régime de l’apartheid. Entretien avec le réalisateur rencontré au Festival de Toronto.
Accusé à tort de terrorisme par le colonel boer Nic Vos (Tim Robbins, halluciné), membre illuminé de l’escouade anti-terroriste, Patrick Chamusso (Derek Luke, très solide), contremaître sans histoire marié et père de famille, quitte l’Afrique du Sud pour le Mozambique après avoir subi la torture et vu mourir injustement ses amis. Là-bas, il subit un dur entraînement afin de joindre les rangs du Congrès national africain à titre de milicien. De retour dans son pays, il luttera au péril de sa vie et des siens pour les droits de l’homme.
"Peu de gens, moi le premier à l’époque, raconte Phillip Noyce, connaissent l’histoire de Chamusso. Lorsque j’ai lu son histoire, je me suis dit qu’elle pouvait nous transmettre l’idée que chacun de nous peut être un héros. Évidemment, je me sentais étranger en arrivant en Afrique, mais bientôt, j’ai rencontré des Sud-Africains, des blancs comme des noirs, qui sont en quelque sorte devenus mes substituts, mes encyclopédies vivantes, mes conseillers à tous les niveaux de la production. Ils étaient présents tout le long du tournage, car je savais bien que moi-même, je n’arriverais à rendre justice à la réalité africaine. Même Patrick Chamusso était toujours aux côtés de Derek – le plan final où ils sont réunis est en fait le jour de leur rencontre."
Si Chamusso existe bel et bien, Nic Vos est quant à lui un amalgame de plusieurs personnes réelles: "Vous ne pourrez pas trouver qui sont ces gens, car nous devons protéger les coupables. C’est en rassemblant des témoignages que j’ai réussi à le créer. Aucune de ces personnes ne se sentait coupable des gestes qu’elle avait commis parce que tous ont admis en public leurs torts et ont été pardonnés. Vous savez, lorsque ces gens se sont enrôlés dans l’escouade anti-terroriste, ce n’était pas pour faire le mal… Ce qui est arrivé par la suite relève d’un tout autre ordre; c’est là qu’on comprend que le pouvoir corrompt."
Comprenant d’horribles scènes de violence, Catch a Fire ne possède certes pas le lyrisme de Rabbit-Proof Fence, toutefois, on y retrouve l’humanisme et la soif de justice de Noyce qui, en ayant marre de tourner à Hollywood, s’est offert le privilège de donner une voix aux opprimés et aux laissés-pour-compte: "Lorsque j’ai lu l’histoire de Chamusso, je me suis dit que d’une drôle de façon, c’était la suite de l’histoire de ces petites aborigènes qui seraient revenues à l’endroit qu’elles avaient fui pour le détruire. Pour moi, cette histoire était non seulement celle de quelqu’un qui veut fuir la répression, mais qui veut l’éliminer. Chamusso symbolisait l’histoire de l’Afrique du Sud qui, après 390 ans d’agonie, se sort glorifiée après un combat de 10 ans."
Toutefois, force est de constater que malgré toutes ses belles intentions louables, le réalisateur, qui offre des images magnifiques de l’Afrique, n’a pas toujours péché par subtilité, car l’ensemble, bien qu’efficace et percutant, aurait gagné à être plus nuancé.
À voir si vous aimez
Rabbit-Proof Fence de Phillip Noyce
Long Night’s Journey Into Day de Frances Reid et Deborah Hoffmann
In My Country de John Boorman