Infamous : Capote, prise 2
Infamous, de Douglas McGrath, met en vedette un Toby Jones absolutely fabulous dans la peau de Capote au moment où il écrivait In Cold Blood. Propos de l’acteur britannique rencontré au Festival de Toronto.
Le mois dernier, le Festival de Toronto semblait se répéter en présentant un film racontant la même histoire que le sublime Capote de Bennett Miller où brillait Philip Seymour Hoffman. Allait-on avoir droit à une pâle copie de l’original?
Toby Jones, qui incarne Truman Capote avec une aisance formidable – accusant même une ressemblance troublante avec le flamboyant écrivain – avance ceci: "Je n’ai pas vu Capote, et plusieurs m’ont dit que je ne l’aimerais peut-être pas. Je ne crois pas que d’aimer un film sur un sujet donné nous empêche d’en aimer un autre."
Il a bien raison, car pendant 118 minutes, Infamous de Douglas McGrath (Emma), basé sur le livre de George Plimpton Truman Capote: In Which Various Friends, Enemies, Acquaintances and Detractors Recall His Turbulent Career, nous fait oublier Capote et jette un nouvel éclairage sur l’histoire que Miller avait si intelligemment et sobrement racontée. Et une fois de plus, on se délecte de la personnalité extravagante et complexe de Capote.
"Pour l’aspect flamboyant du personnage, explique l’acteur, il existe plusieurs images d’archives. Le plus difficile, c’était de trouver le Capote intime, celui que peu ont connu. Comme plusieurs, Capote cachait son insécurité derrière un masque. Je n’avais pas peur de tomber dans l’excès, car le livre et le scénario cherchent à savoir ce qui se cache derrière cette façade qui lui permettait, en dépit de sa petite taille, de son homosexualité et de sa voix singulière, de dire tout ce qu’il voulait à qui il voulait. En rencontrant Perry Smith, c’est comme s’il avait foncé dans un mur, lequel aurait brisé son masque. Plus il s’intéressait à Smith, plus il découvrait sa propre personnalité."
De facture moins classique que le film de Miller, Infamous prend par moments des airs de l’émission Biography, alors que les amis de Capote, dont Harper Lee (Sandra Bullock, correcte) et Babe Paley (Sigourney Weaver, sous-exploitée), viennent témoigner face à la caméra. S’attardant parfois sur le côté people, le film de McGrath possède moins de finesse que celui de Miller, mais s’avère un rien plus troublant par la dimension encore plus sexuelle qu’il donne à l’amitié entre l’assassin Perry Smith (Daniel Craig, torturé à souhait) et Capote.
Jones poursuit: "Les deux livres se basent sur différents témoignages. Tout ce qui est sûr, c’est que quelque chose est réellement arrivé à Capote, car il n’a plus jamais écrit ainsi par la suite. Je crois qu’il a tenté de manipuler Smith et que ça l’a choqué de voir qu’il n’y arrivait pas; c’est peut-être Smith, qui n’avait rien à perdre, qui manipulait Capote. Smith a reconnu sa propre sensualité dans les premiers écrits de Capote; la dimension sensuelle de leur relation est beaucoup plus intéressante que son aspect sexuel."
Au-delà des répliques spirituelles et piquantes qui font rire, Infamous nous laisse avec une impression de tristesse puisque Capote conclut cruellement que l’art valait plus qu’une vie: "Dans cette scène où il boit avec Marella (Isabella Rossellini), on comprend ce que sera le reste de sa vie. Il a payé de sa vie et de la vie de Smith pour écrire son chef-d’oeuvre In Cold Blood. À la fin de sa vie, il a trahi tous ses proches, un peu comme son propre père l’avait fait… c’est cyclique." (26 et 27 oct. au FNC)
À voir si vous aimez
Capote de Bennett Miller
In Cold Blood de Richard Brooks
L’oeuvre de Truman Capote