Mort d'un président : Mais qui a tué Dubyah?
Cinéma

Mort d’un président : Mais qui a tué Dubyah?

Dans Mort d’un président, de Gabriel Range, l’actuel président des États-Unis passe l’arme à gauche. Propos du cinéaste britannique sur son faux documentaire et la vraie controverse qui l’entoure.

Avec Mort d’un président, Gabriel Range a créé l’événement (et remporté le prix de la FIPRESCI) au Festival de Toronto en imaginant l’assassinat de George W. Bush. Avec le scandale qui le précède, on s’attendait à un film morbide et sensationnaliste, alors qu’il s’avère sobre et réfléchi: "Je crois que la réaction négative instinctive à la nouvelle que j’avais fait ce film, explique le cinéaste, vient du fait que les gens croyaient que ce serait une fantaisie libérale qui prendrait plaisir à voir le président Bush assassiné. Ça en a évidemment mené beaucoup à condamner le film sans l’avoir vu, ce qui est ironique considérant qu’un des thèmes est le danger d’un jugement précipité."

La rumeur veut que certains spectateurs aient applaudi pendant la scène où l’on tire sur Bush.

"C’est faux! C’est de la foutaise! Quiconque était assis dans ce cinéma vous dira que ce qui était intéressant des présentations à Toronto, c’est qu’on aurait pu entendre une mouche voler. Plusieurs m’ont dit avoir été émus pendant cette scène."

Pendant l’écriture, craigniez-vous que l’actualité change et vous contredise?

"C’est assurément l’un des dangers d’imaginer une histoire se déroulant dans un futur rapproché; on offre des otages au hasard lorsqu’on prédit que la scène mondiale va aller dans une direction ou une autre. Le jour où le film est sorti au Royaume-Uni, la Corée du Nord a annoncé qu’elle avait complété son premier test nucléaire et Bush a fait des déclarations à la télévision très semblables à celles qu’il fait dans le discours qu’on entend dans le film. Au moins, nous avons visé juste à propos de quelques trucs."

Range a réussi à brouiller de façon incroyable les frontières entre la réalité et la fiction en construisant son film autour d’images d’archives qu’il avait d’abord sélectionnées; le réalisateur a également eu recours aux effets numériques en plus de recréer une manifestation. Empruntant la forme documentaire, Mort d’un président possède la grande qualité de se laisser regarder comme un thriller politique.

Vous illustrez comment, après l’assassinat, le gouvernement et les médias semblent impatients de trouver un bouc émissaire.

"Dans plusieurs cas, l’administration s’est empressée d’arrêter quelqu’un avec une preuve pas totalement convaincante et de déclarer que c’était un dirigeant terroriste. On a l’impression qu’ils recherchent activement des têtes d’affiche du terrorisme pour pouvoir brandir leur photo et dire: "Voilà ce que nous combattons." Ils veulent nous convaincre que nous sommes en guerre, car cela leur permet de faire des choses qui ne passeraient pas en circonstances normales."