Image + Nation : Toutes couleurs unies
Du 16 au 26 novembre, Image + Nation, le Festival international de cinéma LGBT de Montréal, fête son 19e anniversaire.
Pour cette 19e édition, les organisateurs d’Image + Nation convient les cinéphiles à un voyage cinéphilique dont le parcours ne néglige aucun continent et aucun genre. Comédies de moeurs légères, drames psychologiques intenses, pamphlets politiques, documentaires, comédies musicales, tout y passe. De quoi oublier la grisaille de l’automne.
Et quoi de mieux pour lancer les festivités qu’une comédie chorale espagnole? Reinas (Queens) de Manuel Gomez Pereira se veut une célébration de la nouvelle loi espagnole qui légalise les mariages gais. De fait, Madrid a été le premier gouvernement au monde à permettre sans restriction les unions de même sexe. Dans Reinas, des couples gais acceptent de s’unir lors d’une cérémonie unique couverte par les médias. Mais à quelques jours du grand événement, rien ne va plus. Déjà sur le gros nerf à l’approche du jour J, les futurs époux doivent en plus composer avec les frasques de leurs parents respectifs, tous plus névrosés les uns que les autres.
La présence au générique de Carmen Maura (Volver) et de Marisa Paredes (Tout sur ma mère) invite à la comparaison entre ce film et ceux de Pedro Almodovar. Il faut dire que Pereira assume complètement cette filiation, allant même jusqu’à meubler son film de références directes à ceux de son illustre compatriote. Mais si Almodovar, c’est du champagne, Reinas serait plutôt un bon petit mousseux, pétillant, fruité, agréable. Le scénario s’offre une coquetterie: agencer les diverses intrigues parallèles en ordre non chronologique, histoire de rendre tous ces chassés-croisés un peu plus ludiques. Tout cela est vraiment très léger, presque sans conséquence, mais c’est parfait pour ouvrir le festival avec un sourire (Impérial, jeudi, 20 h).
De toute façon, les festivaliers adeptes de choses plus sérieuses ne perdent rien pour attendre. Dans un registre nettement plus sombre, Loving Annabelle de l’Américaine Katherine Brooks se présente comme une sorte d’hommage au légendaire film allemand Jeunes Filles en uniforme de Leontine Sagan (1931). Dans cette variation sur un thème connu, la jeune Annabelle, fille rebelle d’une sénatrice américaine, est envoyée dans un collège privé dirigé de main de fer par une religieuse. Elle s’éprend follement d’une enseignante engluée dans une relation stérile avec un homme. La table est mise pour un juteux mélodrame dans lequel désir charnel, passion amoureuse et préjugés sociaux vont s’entrechoquer. Un film non dénué de quelques maladresses, mais dans l’ensemble plutôt sensible et juste. (Impérial, samedi, 19 h 30)
Comme son titre l’indique, Boy Culture d’Allan Brocka explore les méandres amoureux de jeunes gais à la recherche du grand amour. Ils sont trois à partager le même appartement. X est un séduisant prostitué qui voue un véritable culte secret à son colocataire Andrew, mais cette fascination ne semble pas réciproque. Par contre, X est ardemment reluqué par le jeune Joey, pour qui il ne ressent rien d’autre que de l’amitié. Le film commence au moment où ces trois garçons arrivent à un tournant dans leur vie qui les incite à poser des gestes radicaux pour obtenir ce qu’ils convoitent. Le triangle amoureux qui en résulte ne réserve aucune véritable surprise, mais c’est bien écrit, correctement filmé et joué avec naturel. Et il y a de l’humour ironique, ce qui ne gâche rien. (Impérial, samedi, 21 h 30).
Il y a de l’humour aussi dans Park, mais dans un registre nettement plus cynique. Ce film choral de Kurt Voelker se déroule au cours d’une seule journée dans un parc de Los Angeles où convergent des personnages disparates plongés dans des histoires pas possibles. Ça commence le matin par l’arrivée d’une jeune musicienne qui va passer la journée à essayer en vain de se suicider dans sa voiture. Pendant ce temps, un mari infidèle a rendez-vous dans son gros VUS avec une prostituée déguisée en bonne française. Ils sont épiés par l’épouse trompée, flanquée de sa meilleure amie, une lesbienne en puissance. Pendant ce temps, deux jeunes hommes confus sur le plan sexuel tentent de convaincre des collègues de travail féminines des bienfaits du nudisme… Tout cela pour nourrir des intrigues qui partent un peu dans tous les sens, sans vraiment mener nulle part. (Impérial, dimanche, 21 h 30).
Parmi les événements spéciaux à signaler cette semaine, mentionnons le lancement du livre The Romance of Transgression in Canada: Queering Sexualities, Nations, Cinemas du Montréalais Tom Waugh, ainsi qu’un symposium d’une journée sur le thème de la transgression gaie (samedi, Cinéma de Sève, 13 h). Nous reviendrons la semaine prochaine sur la suite du festival, notamment la présentation très attendue de deux documentaires-chocs sur le crystal meth et d’une table ronde sur le sujet.