Volver : La mort lui va si bien
Volver marque le retour de Penélope Cruz et de Carmen Maura dans l’univers de Pedro Almodóvar.
Après deux films essentiellement "masculins" (Parle avec elle, La Mauvaise Éducation), Pedro Almodóvar s’en remet au chant choral féminin. Dans Volver, son nouvel opus, les hommes sont, sinon absents, accessoires et, au mieux, de simples séducteurs.
Ce choeur est joyeux, rythmé par les bienfaits de la collectivité. La scène d’ouverture donne le ton: trois des muses du cinéaste (dont Penélope Cruz, dans un magistral retour au cinéma espagnol) nettoient une tombe en chantant allègrement.
Volver (revenir) porte bien son titre. Pas tant parce que la trame narrative replonge dans le passé (sujet cher à Almodóvar), mais parce que le réalisateur de Tout sur ma mère ramène le cinéma qui a fait sa réputation.
La présence de son actrice fétiche des années 1980, Carmen Maura, est d’ailleurs significative. Pour son premier Almodóvar depuis Femmes au bord de la crise de nerfs, elle fait tout un retour dans la peau d’une revenante.
Davantage comédie que drame, Volver est plus proche de l’Almodóvar des années 1980 que de celui des années 2000. On rit noir dans ce récit dit d’un surréalisme naturaliste. Et puis? C’est profond, malgré son apparente légèreté. Derrière cette histoire de fantômes, il y a une volonté de parler de non-dits. Plus subtil qu’à ses débuts, Almodóvar aborde des thèmes (la violence conjugale, l’amour maternel) sans vraiment en parler.
L’histoire est complexe, tant plusieurs réalités la tissent. Raimunda (Cruz), mère d’une ado (Yohana Cobo), et sa soeur Soledad (Lola Duenas) vivent le deuil de leur mère (Maura) à leur façon. Et c’est à travers les yeux de la plus crédule que la défunte réapparaît.
Almodovar puise habilement dans les superstitions et croyances populaires. La mort passe mieux. Aussi aime-t-il évoquer Hitchcock, le plus loufoque (Qui a tué Harry?), avec un crime (presque) secondaire aux conséquences absurdes. La musique du fidèle Alberto Iglesias renvoie également au maître du suspense.
Volver rappelle aussi le néoréalisme italien, ne serait-ce que par cette Penélope Cruz dont le physique, la démarche et la personnalité évoquent la Sophia Loren des années 1950. Par ailleurs, un plan s’avère mémorable – pas forcément magnifique. En plongée, Almodóvar montre Raimunda en décolleté, faisant la vaisselle. Lavant, précisément, un couteau grand comme ça, bien savonneux. Tout est là, façon provocante et alléchante.
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