Sa Majesté la Reine : Noblesse oblige
Dans Sa Majesté la Reine, de Stephen Frears, la royale Helen Mirren campe une Elizabeth II plus vraie que nature.
Sur papier, Sa Majesté la Reine avait tous les éléments pour produire un banal, voire médiocre, téléfilm. Imaginez: raconter comment la famille royale a géré la mort de Lady Di, princesse du peuple fauchée dans un accident de la route le 30 août 1997 à Paris. Et pourtant, entre les mains du scénariste de The Last King of Scotland Peter Morgan (prix du meilleur scénario à Venise) et de Stephen Frears, Sa Majesté la Reine s’avère un drame historique d’une grande finesse.
Évitant à tout moment de sombrer dans le sensationnalisme, Frears brosse un portrait intime et humain d’une femme qui n’a jamais cessé de s’effacer derrière le protocole. Une femme qui, devenue reine à 25 ans, a porté à bout de bras la monarchie, alors que ses enfants, ses belles-filles, Diana en tête, en bousillaient l’image en devenant la proie des paparazzi et en faisant les choux gras de la presse à scandales par leurs moeurs jugées non aristocratiques. Cela dit, il ne faudrait pas voir Sa Majesté la Reine comme un éloge du royalisme puisque Frears n’hésite pas à montrer le mépris qu’affichent certains membres de la royauté face à tout ce qui ne concerne pas les têtes couronnées, de même que leur difficulté à s’adapter au monde d’aujourd’hui.
Avec sensibilité et intelligence, Frears dévoile les complexités d’une histoire archiconnue, celle de la crise qu’a dû affronter la reine Elizabeth (remarquable Helen Mirren, prix de la meilleure interprétation féminine à Venise) cette fameuse semaine de septembre 1997. Face aux pressions du peuple, fou de cette belle princesse au grand coeur qui ignorait à peu près tout de la politique de son pays, et au fringant nouveau premier ministre travailliste Tony Blair (Michael Sheen, très convaincant), la reine a dû contre son gré déroger au protocole.
Alors que la télé nous a gavés de réalisations racoleuses ou mielleuses mettant en vedette une galerie de sosies royaux au jeu tiède, Sa Majesté la Reine met l’accent sur la psychologie des personnages et non sur leur ramage – Mirren accuse toutefois une ressemblance troublante avec la souveraine. Qui plus est, Frears, de connivence avec le documentariste Adam Curtis, a su donner encore plus de force à son récit en le ponctuant subtilement d’images d’archives. Un festin royal pour le spectateur.
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