Rétrospective Georges Dufaux : Je me souviens
L’oeuvre de Georges Dufaux est à l’honneur à la Cinémathèque québécoise qui, après une touchante soirée hommage, présente une sélection de ses films.
Samedi, 19 mai. Par une fin d’après-midi ensoleillée, un événement très spécial se déroulait à Montréal: un hommage à Georges Dufaux, une figure clé de notre cinématographie nationale. Pourtant, alors que toutes les premières de films commerciaux made in Québec qu’on aura oubliés dans six mois sont inévitablement l’occasion de tout un cirque médiatique, il n’y avait pas foule à la Cinémathèque.
Qu’importe, les gens présents étaient conscients de leur chance. Il faut préciser que Dufaux, après avoir fait carrière ici pendant cinq décennies, vit maintenant en Suisse. C’était donc une occasion privilégiée pour ses pairs de le célébrer, et beaucoup d’entre eux ont répondu à l’appel, dont Marcel Carrière (avec qui Dufaux s’est rendu au Gabon en 1963 pour tourner Rencontres à Mitzic), Jean-Claude Labrecque (avec qui il a collaboré pour Jeux de la XXIe olympiade en 1976) et Werner Nold (monteur de Quelques Chinoises nous ont dit, un des films que Dufaux a réalisés en Chine au début des années 80). Même Denys Arcand, qu’on croyait déjà à Cannes, a tenu à venir saluer celui qui a entre autres fait de lui le sujet d’un documentaire (De l’art et la manière chez Denys Arcand, 2000).
Il était touchant de voir Dufaux, frêle et visiblement ému, se diriger laborieusement vers l’avant de la salle Claude-Jutra, encouragé par celle qui fut pendant plusieurs années sa collègue, Diane Létourneau: "Viens-t-en, Georges! Jean-Michel, amène ton papa en avant!" Animée par Pierre Véronneau, la soirée présentait en alternance des témoignages de proches de Dufaux et, une image valant mille mots, nombre d’extraits de ses films et de ceux dont il a assuré la direction photo, tels que Les Petites Soeurs (1959) de Pierre Patry et La Demoiselle sauvage (1991) de Léa Pool.
Cette dernière, qui fut étudiante de Dufaux à l’UQAM avant de tourner avec lui, décrit bien la passion pour le cinéma qui l’animait: "Il fallait toujours grimper plus haut pour voir si le point de vue n’était pas plus intéressant." Dufaux a aussi été un mentor pour François Girard, qui fut son assistant-caméra et considère cette expérience inestimable dans son parcours: "Ça a été mon école, je me rappelle toutes les notes que j’ai prises."
Longtemps à l’emploi de l’Office National du Film (où il fut directeur du Programme français de 1986 à 1989), Dufaux a contribué à l’émergence du cinéma direct et, bien que sa filmographie inclue plusieurs fictions, notamment C’est pas la faute à Jacques Cartier (1967), il a particulièrement fait sa marque en tant que documentariste. Son oeuvre est celle d’un cinéaste engagé, intéressé par les questions sociales et politiques, mais sans devenir moralisateur. Bien souvent, observer une réalité difficile sans détourner le regard suffit. Par exemple, l’humiliation et la colère de l’homme qui se fait placer dans un centre de soins de longue durée, dans Au bout de mon âge (1975), vaut plus que tous les discours creux sur la santé que tiennent les politiciens.
Finalement, la simplicité de l’hommage était peut-être appropriée, à l’image d’un personnage discret mais attentif et, avant tout, profondément humain.
Jusqu’au 13 juin
À la Cinémathèque québécoise
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