60e Festival de Cannes : Ombres et lumières
Cinéma

60e Festival de Cannes : Ombres et lumières

Le 60e Festival de Cannes s’est terminé dimanche dernier avec la montée des marches de l’équipe de L’Âge des ténèbres. Retour sur le palmarès.

Les médias du monde entier ont beau abreuver le public de clichés de stars, le Festival de Cannes est plus qu’un rendez-vous glamour à l’américaine, c’est d’abord et avant tout une célébration du septième art qui fait la part belle aux oeuvres des quatre coins du monde.

Si les membres du jury se montraient réticents à juger les films, ces derniers, Stephen Frears en tête, ont fait preuve d’une belle générosité et ont permis à des artistes quasi inconnus de sortir de l’ombre. Pour la première fois de son histoire, la Palme d’or a échu à un film roumain, le puissant 4 mois, 3 semaines et 2 jours de Cristian Mungiu, qui traite, dans un style près de celui des frères Dardenne, de l’avortement avant la chute de Ceausescu.

Pressenti par plusieurs pour la Palme d’or, Julian Schnabel a dû se contenter du Prix de la mise en scène pour Le Scaphandre et le Papillon où l’excellent Mathieu Amalric incarne le journaliste Jean-Dominique Bauby, qui fut atteint du locked-in syndrome à la suite d’un AVC. Bien que lourd par moments, le film, qui adopte en majeure partie le point de vue de Bauby, traduit parfaitement les états d’âme d’un homme prisonnier de son corps.

Pour sa part, Fatih Akin a remporté le Prix du scénario pour De l’autre côté, récit émouvant sur la filiation et le sentiment d’appartenance, dont la structure rappelle Inarritu, en moins complexe mais plus plausible, où deux familles, l’une allemande, l’autre turque, verront leurs destins fatalement liés.

Le jury a aussi jeté son dévolu sur le récit d’un vieil homme et d’une femme devant apprivoiser la perte d’un être cher, La Forêt de Mogari de Naomi Kawase, lauréate de la Caméra d’or en 1997 pour Susaku, en lui décernant le Grand Prix.

Le Prix du jury a été remis ex æquo au film d’animation Persepolis de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud, lequel raconte avec un irrésistible mélange de gravité et de légèreté les tribulations d’une jeune Iranienne rebelle, et à Lumière silencieuse de Carlos Reygadas, drame d’une grande beauté plastique abordant l’adultère chez les mennonites du Nord du Mexique.

Grâce à son souffle lyrique et à sa structure subtilement éclatée, Paranoid Park de Gus Van Sant a reçu le Prix du 60e anniversaire, tandis que l’acteur Konstantin Lavronenko (Le Bannissement d’Andreï Zviaguintsev) et l’actrice Jeon Do-yeon (Secret Sunshine de Lee Chang-dong) ont ému le jury.

Enfin, accueilli par un froid silence de la part des critiques, L’Âge des ténèbres de Denys Arcand, peinture pessimiste mâtinée d’une forte dose d’humour noir de notre société, portée par un Marc Labrèche au sommet de son art mais dont le propos est malheureusement noyé dans une suite de saynètes oniriques d’un intérêt inégal, a séduit le public cannois lors de la soirée de clôture. Au bout du compte, Arcand ne nous aura pas fait honte…