Once : La mélodie du bonheur
Avec Once, le cinéaste irlandais John Carney démontre qu’il est possible de faire une comédie musicale sans fla-fla.
Quand on pense comédie musicale, on imagine généralement un film à grand déploiement, où les numéros chantés, autant que les émotions, sont exacerbés. On n’y avoue pas timidement à l’être aimé qu’il nous plaît bien, on grimpe sur un éléphant couvert de draperies et de joyaux et on crie haut et fort son amour pour que tout Paris l’entende!
Or, l’approche préconisée par Once est diamétralement opposée à celle de films comme Moulin Rouge!: pas de chorégraphies, pas de costumes à paillettes ni de décors extravagants. En outre, l’histoire d’amour est racontée sobrement, tellement qu’on pourrait presque penser qu’il s’agit d’une histoire d’amitié, même si l’attirance entre les deux personnages principaux est palpable. L’ambiguïté vient du fait qu’ils n’expriment jamais leurs sentiments ouvertement, si ce n’est à travers les chansons qu’ils interprètent ensemble.
Précisons que ces dernières ne sont ni décoratives ni en aparté, mais font partie intégrante du récit, dont le sujet même est la composition et l’enregistrement de ces pièces musicales par un musicien de rue de Dublin (Glen Hansard, éminemment charismatique) et une jeune immigrante tchèque (Markéta Irglová, attendrissante). Le film se déroule durant une semaine, de leur rencontre, alors que le gars joue sur la place publique, jusqu’à une série de nuits blanches à enregistrer en studio, après qu’il eut découvert que la fille est elle aussi musicienne et que leurs voix s’harmonisent des plus joliment. Jusqu’où cet accord musical pourra les mener est grandement laissé à l’imagination des spectateurs, le film préférant suggérer les choses plutôt que forcer la note.
John Carney décrit avec justesse son film comme "un disque en images". D’ailleurs, l’écriture du scénario fut autant musicale que dramatique, le réalisateur et Hansard (de la formation The Frames, dont Carney est l’ex-bassiste) s’échangeant passages de dialogues et compositions, l’un influençant l’autre et vice versa. Ainsi, Once est tout en fluidité, les chansons émergeant naturellement de la trame narrative. Et quelles chansons! Se situant quelque part entre le Radiohead des débuts (époque The Bends) et l’oeuvre de son compatriote irlandais Damien Rice, les pièces composées par Hansard sont immédiatement accrocheuses et poignantes.
Tourné en deux semaines avec un budget minime, Once ne possède évidemment pas le glamour qu’on associe habituellement aux comédies musicales, mais le charme opère néanmoins merveilleusement.
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