Citizen Lambert: Jeanne D’ARChitecture : L’archi-têtue
Citizen Lambert: Jeanne D’ARChitecture, de Teri Wehn-Damisch, trace le portrait de la Montréalaise Phyllis Lambert, jeune octogénaire animée d’une passion inaltérable pour l’architecture et pour sa ville natale.
Le film s’ouvre sur un fou rire. Dans sa maison toute blanche du Vieux-Montréal, la citoyenne Phyllis Lambert s’esclaffe, sans que l’on sache exactement ce qui provoque cet élan de bonne humeur. Pas grave, puisque ça donne le ton de ce portrait placé sous le signe de l’hommage décontracté et ludique. Ce qui ne veut pas dire que les thèmes abordés ne sont pas sérieux. Au contraire, car la fondatrice du Centre canadien d’architecture ne traite pas ses passions à la légère.
Certaines d’entre elles sont déclinées tout au long du film à la manière d’un abécédaire personnalisé: A pour architecte, P pour photographie, etc. Certaines lettres permettent d’évoquer des traits particuliers de la forte personnalité de cette battante (I pour impatiente. "Ça va de pair avec la passion", dit-elle). D’autres servent à introduire des aspects plus douloureux de sa vie (B, comme dans Bronfman, son nom de jeune fille, qui l’incite à parler de son enfance, à la fois dorée et répressive, dans un château de Westmount).
Il eut été facile – et sans doute tentant -, de sombrer dans les superlatifs pour mettre en valeur les accomplissements remarquables de cette citoyenne du monde qui a consacré sa vie (et une bonne partie de sa considérable fortune) à sa passion pour l’architecture. Après tout, on parle ici d’une milliardaire qui cumule 16 doctorats honorifiques! Mais, histoire d’éviter le piège de l’hagiographie figée et pompière, la réalisatrice a misé sur un style éclaté et très vivant qui rend plusieurs fois hommage au célèbre prologue en forme d’actualités cinématographiques de Citizen Kane. Ajoutez à cela une utilisation inventive et variée d’un généreux florilège d’archives, et vous obtenez un documentaire-portrait riche et captivant, bien que légèrement capricieux dans sa structure.
Il faut dire qu’on pourrait braquer une caméra et un micro sur cette grande communicatrice qu’est madame Lambert et simplement l’écouter discourir sur tous les sujets qui nourrissent ses passions, sans jamais s’ennuyer. C’est la principale qualité de ce film: saisir en moins d’une heure la flamme ardente et la personnalité multiple de cette femme forte, militante, fonceuse, intraitable, têtue, mais aussi gamine, coquette et généreuse.
À voir si vous aimez
My Architect: A Son’s Journey de Nathaniel Kahn
Ordinaire ou super: Regards sur Mies Van Der Rohe de Patrick Demers et Joseph Hillel.
Sketches of Frank Gehry de Sydney Pollack.