Nitro : L'âge de la machine
Cinéma

Nitro : L’âge de la machine

Nitro est un film d’action robuste, mais aussi une histoire d’amour et une critique sociale. Guillaume Lemay-Thivierge, Lucie Laurier et le réalisateur Alain Desrochers nous en parlent.

Bien que vendu comme une suite ininterrompue de courses de voitures, de bagarres et de filles sexy, Nitro s’avère un film où les émotions prennent autant de place que les artifices: "Pour moi, explique Alain Desrochers, c’est un film d’amour. C’est un gars qui est prêt à n’importe quoi pour sauver sa blonde, qui est prêt à foncer comme c’est pas permis, c’est pour ça qu’il vole carrément un coeur. Il s’arrange dans une société où les systèmes médicaux ne sont pas toujours adéquats. J’avais le goût qu’il y ait un contenu véritable et des sujets sociaux qui sont assez virulents, quand tu t’arrêtes pour les regarder."

Le film est tout de même né d’un désir de faire un film d’action, genre peu représenté dans notre cinématographie nationale: "Il faut toujours aller voir les films américains, déplore Desrochers. Je me disais: pourquoi pas un film d’action québécois? Puis, plus on écrivait, Benoît Guichard, le scénariste de mon film La Bouteille, et moi, plus on ramenait ça vers une histoire plus émotionnelle. Plus ça allait, moins il y avait d’action et plus il y avait de tendresse. Mais j’avais le goût qu’il y ait une tension tout le long quand même."

Lorsqu’on demande au cinéaste quels films l’ont influencé pour Nitro, il mentionne le classique du "film de chars" Point limite zéro (Vanishing Point) et le film d’action français Banlieue 13, mais aussi un titre plus surprenant: "La scène finale est directement inspirée d’un film de Claude Sautet, Les Choses de la vie." On est vraiment loin du dérivé de The Fast and the Furious auquel certains s’attendaient!

LEMAY-THIVIERGE, WILLIS: MÊME COMBAT

Pour Guillaume Lemay-Thivierge, qui en a pourtant vu d’autres, lui qu’on voit au cinéma et à la télévision depuis son enfance, Nitro est un cadeau tombé du ciel: "C’est exactement ce que j’ai toujours rêvé de faire: de l’action, de la course, de la bataille, du suspense, des cascades… Je ne pouvais pas espérer mieux."

Lemay-Thivierge, qui, comme toute une génération de mecs, s’est enthousiasmé en regardant Bruce Willis dans Die Hard quand il était jeune, se retrouve maintenant lui-même en tête d’affiche d’un film d’action. Quand on fait remarquer au comédien que Nitro prendra justement l’affiche la même semaine que le quatrième volet de Die Hard, il répond du tac au tac: "Pauvre Bruce, il doit avoir la chienne en tabar…!"

Alors que les productions hollywoodiennes sont de plus en plus noyées sous les effets spéciaux, Nitro est en quelque sorte un retour vers un genre de film d’action plus direct: "Je suis allé voir Spider-Man 3 dernièrement, raconte Lemay-Thivierge, et dès qu’il se mettait à voler ou à se suspendre, je décrochais parce que je savais que ce n’était plus lui, c’est de l’animation par ordinateur. Tu sens toute la technique en arrière, même si c’est bien fait. Avec Nitro, on a voulu faire un film plus réel. Les cascades sont hot, elles sont poussées à l’extrême, mais elles se peuvent à la limite. J’ai dit à Alain: "Je veux tout faire." Moi, mon idole, c’est Jean-Paul Belmondo, alors je me suis retrouvé à faire un Belmondo de moi-même!"

Le film fut aussi très demandant dramatiquement pour l’acteur, qui passe de jeune bum à père de famille et à héros enragé: "J’ai de l’agressivité en moi, mais qui sort juste pour les personnages, parce que je ne suis pas comme ça dans la vie. J’ai peur de la bataille et de la guerre pour mourir. Mais quand c’est le temps d’être un peu fou et agressif dans un rôle, je suis bien là-dedans, c’est mon défoulement personnel."

HEUREUX HASARDS

Lucie Laurier, qui joue l’ex du personnage de Lemay-Thivierge, semble être devenue un porte-bonheur pour le cinéma québécois, ayant contribué au succès phénoménal de films comme La Grande Séduction et Bon Cop, Bad Cop: "Les autres films à succès, je vais rester modeste, c’est pas moi qui les portais sur mes épaules… C’est un heureux hasard."

Laurier est impliquée dans Nitro depuis le début; Desrochers, un ami de longue date, la voulait dans son film depuis l’écriture du scénario. L’appréciation est réciproque: "Ce que j’aime d’Alain, confie-t-elle, c’est que tu peux lui apporter n’importe quoi et il est ouvert. Il veut juste faire un meilleur film, plus touchant."

C’est d’ailleurs cet aspect plus personnel, plus réfléchi du projet qui l’a séduite: "Le propos est soutenu, il y a un dilemme moral, les personnages ne sont pas stéréotypés. Mon personnage, c’est pas juste une pitoune, c’est une fille qui a du caractère. J’aimais le côté fille d’action, mais je trouvais que le personnage aurait été beaucoup moins intéressant si je ne lui avais pas apporté une sensibilité puis une blessure, afin qu’on comprenne pourquoi elle est comme ça."

Laurier a néanmoins apprécié la chance de prendre part à des scènes d’action: "C’est sûr que quand tu bouges beaucoup, quand tu fais des affaires plus dans le mouvement, le texte devient moins lourd. C’est peut-être quelque chose de plus instinctif qui sort. Je suis très physique dans la vie, alors j’ai aimé ça."

Comme spectatrice, elle a aussi certaines affinités avec le cinéma d’action: "J’ai des goûts très larges, je peux aimer The Bourne Identity avec Matt Damon, puis je peux aimer un film comme Babel. Mais j’aime les bons films d’action, les films qui marchent. Mon fils a eu sa passe Van Damme, alors je regardais ça avec lui!"

Enfin, le tournage de Nitro a été l’occasion de renouer avec Lemay-Thivierge, qu’elle avait déjà côtoyé dans des circonstances bien différentes: "Quand on était petits, on avait fait une émission Droit de parole sur les enfants vedettes. Je me souviens que ça n’avait pas cliqué, il me niaisait. Je les aimais pas, lui et Mahée Paiement, ils faisaient le petit couple populaire, moi je faisais plus des films d’auteur… Mais c’est sur le plateau de Nitro que j’ai réalisé à quel point on avait des choses en commun: on est tous les deux parents, on a tous les deux commencé jeunes, on est tous les deux physiques, on est tous les deux petits! On a une belle chimie à l’écran", conclut l’actrice.

En salle le jeudi 28 juin dès 22 h