La Faute à Fidel : Le confort et l’indifférence
La Faute à Fidel est le premier long métrage de fiction de Julie Gavras. Bref entretien avec une réalisatrice fascinée par l’enfance qui attend encore de devenir une adulte.
Adaptation libre d’un roman de Domitilla Calamai, La Faute à Fidel raconte, à travers le regard d’une fillette réactionnaire (l’étonnante Nina Kervel-Bey), l’engagement communiste d’un jeune couple bourgeois formé d’un avocat espagnol (l’Italien Stefano Accorsi) et d’une journaliste (Julie Depardieu), au retour d’un voyage au Chili, peu avant le coup d’État de 1973.
Fille de Costa-Gavras, Julie Gavras a découvert le cinéma et la politique grâce à Missing: "À partir du moment où je parlais des années 70 et de parents engagés, explique au téléphone celle qui a grandi sur les plateaux de tournage, l’impression que m’avait faite le film faisait que je ne pouvais pas ne pas parler du Chili. L’expérience d’Allende avait cristallisé beaucoup d’espoir en Amérique latine et en Europe; ce qui était intéressant et nouveau à propos de cette expérience, c’est qu’Allende avait dit qu’il ferait une révolution dans le cadre des lois bourgeoises."
Malgré son regard souvent noir et sa moue boudeuse, la fillette n’en demeure pas moins attachante puisque Gavras, qui a ajouté beaucoup d’éléments autobiographiques au récit sans pour autant le trahir, a su illustrer à merveille le désarroi d’une enfant qui perd tous ses repères du jour au lendemain: "La difficulté du film, poursuit la réalisatrice, c’était de partir avec une petite fille qui est quand même limite antipathique, alors qu’au cinéma, les enfants sont mignons, sympathiques, bien que dans la vie ce soient des personnes comme les autres: il y en a qu’on trouve sympathiques, d’autres pas. Je pense que les enfants de moins de 10 ans ont un petit côté réac parce que les choses bien organisées les rassurent. On a fait exprès de la construire très princesse agaçante parce qu’il fallait que le gap avec les parents soit énorme."
Faisant fi de la nostalgie, cette comédie dramatique pleine d’esprit évoque avec une gentille moquerie une époque où les jeunes croyaient encore pouvoir changer le monde. "C’est gentil dans le sens où je regrette que ma génération ne pourra jamais croire cela. Et forcément, il y a le recul d’aujourd’hui là-dessus", conclut Julie Gavras.
À voir si vous aimez
Machuca d’Andrés Wood
La Faute à Fidel de Domitilla Calamai