Paprika : La science des rêves
Dans Paprika, du brillant cinéaste d’animation Satoshi Kon, rêve et réalité s’entremêlent de façon extraordinaire.
En seulement quatre films (plus une série télé, Paranoia Agent), Satoshi Kon s’est établi comme l’un des grands maîtres de l’animation japonaise. Mis à part le plus conventionnel mais néanmoins sympathique conte pour enfants Tokyo Godfathers, son oeuvre démontre qu’on peut faire du dessin animé foncièrement adulte, sans toutefois sombrer dans la démesure violente et sexuelle. Ce qui démarque les films de Satoshi Kon, c’est la finesse avec laquelle les personnages sont développés et, surtout, leur complexité narrative et visuelle.
Dans Perfect Blue, Millenium Actress et maintenant Paprika, les points de vue se multiplient, les limites entre les niveaux de conscience se brouillent, et il est souvent ardu de distinguer rêves, souvenirs et réalité. Ce type de jeu avec la perception est particulièrement approprié au cinéma d’animation, car cela permet d’expérimenter avec une variété de styles, allant d’un certain réalisme à l’imagerie la plus grotesque.
Paprika se déroule dans un futur rapproché, alors que des psychothérapeutes viennent de mettre au point un dispositif du nom de la DC Mini, qui leur permet non seulement d’observer les rêves de leurs patients mais d’y pénétrer. Lorsqu’un de ces appareils est subtilisé par un individu aux intentions malveillantes, la docteure Atsuko Chiba prend la forme de son alter ego Paprika pour aller enquêter dans le monde des rêves et débusquer le mystérieux terroriste du subconscient.
Les songes surréalistes qu’on découvre prennent diverses formes, dont celle d’une gigantesque parade de grenouilles jouant d’instruments de musique, d’électroménagers dansants, de statues de chats qui se font aller la patte et d’une foule d’autres objets, poupées et jouets. Plusieurs rêveries sont aussi littéralement cinématographiques, les personnages évoluant dans des films dans le film, plongeant à travers un écran ou une caméra, discutant de techniques filmiques… Satoshi Kon se permet même un clin d’oeil à ses films précédents.
Le tout est visuellement superbe, l’animation étant riche et inventive du début à la fin, mais l’histoire (inspirée du roman de science-fiction de Yasutaka Tsutsui) est tout aussi captivante, bien qu’elle porte souvent à confusion. Pour reprendre le cliché d’usage, Paprika exige qu’on adopte une logique onirique, où les émotions et les pensées qu’inspire une scène priment sur son contexte. D’une façon ou d’une autre, les fans du cinéaste seront ravis.
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