Bluff : L’appartement
Bluff, de Marc-André Lavoie et Simon-Olivier Fecteau, arrive sur nos écrans après avoir été chaleureusement accueilli au FFM.
Avant de démolir un bâtiment, un ouvrier (Jean-Philippe Pearson) décide de faire une dernière ronde. En ouvrant la trappe du plancher d’un des logements, il fait une consternante découverte. Le propriétaire de l’immeuble (Raymond Bouchard), par contre, ne semble pas s’en inquiéter outre mesure. Pour cause, il affirme s’être résigné au fait qu’on ne sait jamais vraiment à qui on loue et qu’au cours des 15 dernières années, toutes sortes d’individus ont habité l’appartement en question…
Cette ingénieuse amorce permet de raconter plusieurs histoires impliquant un grand nombre de personnages tout en n’utilisant qu’un seul lieu de tournage, ce qui sauve évidemment bien des soucis (et des dépenses) à la production. D’autre part, ceci introduit un certain suspense car, alors qu’on va et vient entre les différentes intrigues, on se demande laquelle finira tragiquement.
Le film n’est toutefois pas dramatique du début à la fin, loin de là! Une autre qualité du concept est justement qu’il permet une variété de tons, certaines vignettes étant relativement réalistes alors que d’autres sont carrément absurdes. Thématiquement, elles se rejoignent toutefois dans la façon dont elles impliquent toutes des mensonges, de la manipulation et, oui, du bluff: un voleur (Marc Messier) cache à son complice (Nicolas Canuel) qu’ils sont en train de dévaliser son propre appartement; un boxeur amateur (Rémy Girard) tente de convaincre son gendre (Pierre-François Legendre) qu’il a déjà été un grand champion; un couple (Isabelle Blais et Alexis Martin) négocie avec un inconnu (Gilbert Sicotte) pour lui vendre une toile qu’ils ont perdue, et ainsi de suite.
Bluff a été réalisé à quatre mains par Marc-André Lavoie et Simon-Olivier Fecteau, qui en sont tous deux à leur première expérience de long métrage après plusieurs années à faire des courts. La transition n’est pas trop drastique, considérant la structure en petits récits croisés, mais le "couple créatif" (pour citer Fecteau) s’efforce quand même de donner une unité formelle à l’ensemble. Ceci est particulièrement évident dans le montage, qui croise habilement les différentes trames en créant des échos entre elles, et dans l’excellente musique de Frédéric Bégin, qui donne au film son élan.
On peut regretter la facture visuelle plus ou moins soignée, attribuable au budget modeste, mais ceci n’enlève rien aux nombreux gags réussis et aux réjouissantes performances des comédiens.
À voir si vous aimez
Québec-Montréal, de Ricardo Trogi
Short Cuts, de Robert Altman