Nos souvenirs brûlés : L’ami de la famille
Avec Nos souvenirs brûlés, la réalisatrice danoise Susanne Bier s’américanise en mode mélo mollo.
Qu’est-ce qui pousse les réalisateurs étrangers à faire le grand saut à Hollywood? L’appât du gain? La reconnaissance internationale? L’envie de flirter avec le star-système américain? Peu importe la raison, chaque fois que cela arrive, c’est comme si le principal intéressé y perdait un peu de son âme.
C’est le cas ici de Susanne Bier, réalisatrice danoise et ex-disciple du Dogme 95 ayant tourné avec la crème des acteurs du pays de la petite sirène, tel Mads Mikkelsen, croisé en vilain dans Casino Royale. Ainsi, pour Nos souvenirs brûlés, celle qui a signé de si déchirants et complexes mélodrames avec le scénariste Anders Thomas Jensen a dû se contenter des personnages moins fouillés et d’un scénario sans surprise d’Allan Loeb, scénario qui échappe néanmoins à quelques recettes éprouvées.
Alternant entre le présent et le passé immédiat, ce qui lui permet d’avoir recours aux coupes franches qu’elle affectionne, Bier raconte le drame d’une jolie maman de deux charmants enfants (Halle Berry) qui, après avoir perdu tragiquement son mari (David Duchovny, insipide), trouvera réconfort auprès du meilleur ami de ce dernier, un héroïnomane qu’elle n’a jamais pu blairer (Benicio del Toro).
Bien qu’elle semble vouloir ne pas effrayer le public américain, Bier laisse poindre çà et là sa griffe singulière. L’on retrouve donc sa caméra, un peu moins nerveuse qu’à l’habitude, qui traque toujours d’aussi près, jusqu’à l’indécence, ses personnages afin d’y capter leurs émotions.
On dit que les yeux sont le miroir de l’âme, mais vus de si près, ce sont les cernes de del Toro et les pattes d’oie de Berry, les yeux toujours voilés de larmes, qui n’auront plus de secret pour nous. Qui plus est, ce procédé qui l’avait si bien servie dans ses précédents films souligne ici le manque de profondeur de cet ensemble larmoyant.
Enfin, d’une belle justesse en veuve aigrie et inconsolable, Halle Berry prouve que son Oscar n’était pas une erreur de parcours. Quant à Benicio del Toro, lui aussi détenteur d’un Oscar, il met chaque fibre de son corps au service de son personnage torturé. Rares sont les acteurs qui s’investissent avec autant de générosité et d’abandon.
À voir si vous aimez /
After the Wedding, Brothers et Open Hearts de Susanne Bier