Expiation : Le temps retrouvé
Cinéma

Expiation : Le temps retrouvé

Avec Expiation, son deuxième long métrage, le Britannique Joe Wright prouve une fois de plus qu’il est un brillant metteur en scène.

En 2006, le magazine américain Variety consacrait Joe Wright en en faisant l’un des 10 réalisateurs à surveiller. L’année d’avant, celui-ci avait ébloui la critique par le brio avec lequel il avait adapté Pride and Prejudice de Jane Austen. On y retrouvait notamment une magnifique scène de bal où à l’aide de souples mouvements de caméra, Wright nous entraînait parmi les danseurs et faisaient se rencontrer Elisabeth (Keira Knightley) et Darcy.

Cette fois, le jeune metteur en scène de 35 ans récidive avec une remarquable adaptation d’Expiation, best-seller de Ian McEwan, dont Roger Michell nous avait fait découvrir Enduring Love avec Daniel Craig. Dans cette riche et dense fresque romanesque, Cecilia Tallis (Knightley), jeune femme de bonne famille, se voit cruellement séparée de son amoureux Robbie Turner (James McAvoy) après que Briony (Saoirse Ronan), sa petite soeur de 13 ans à l’imagination délirante, eût accusé ce dernier à tort d’un crime. Toute sa vie, la fautive (interprétée à l’âge adulte par Romola Garai et Vanessa Redgrave) cherchera à se repentir par l’écriture de cette faute auprès de sa soeur aînée et de son amour perdu.

Magnifique film sur la mémoire, celle qui embellit, trahit puis oublie, Expiation dépeint superbement la vie oisive d’une famille bourgeoise des années 30 avant d’illustrer en une époustouflante suite de tableaux les ravages de la Seconde Guerre mondiale.

Fils de soldat ayant passé une majeure partie de son enfance sur une base militaire, McEwan décrivait avec moult détails la vie de guerrier dans les tranchées, et cette minutie, on la retrouve dans ce magistral travelling de six minutes où l’on suit Robbie sur la plage de Dunkerque durant l’évasion britannique en 1940.

Au-delà de ce grand moment de cinéma, de même que du jeu impeccable des acteurs, Expiation n’est pas sans rappeler la finesse de Proust, qui, dans le dernier tome d’À la recherche du temps perdu, traitait du choc d’un écrivain découvrant enfin sa vocation après avoir vampirisé toute sa vie son entourage. À travers le personnage de Briony, rarement aura-t-on vu au grand écran le mystère de la création littéraire exposé avec autant de maestria.

À voir si vous aimez /
Expiation, roman de Ian McEwan, Pride and Prejudice de Joe Wright, Doctor Zhivago de David Lean