La Belle Empoisonneuse : Frime et châtiment
Cinéma

La Belle Empoisonneuse : Frime et châtiment

La Belle Empoisonneuse, de Richard Jutras, plonge Maxime Denommée et Isabelle Blais dans une tragicomédie romantique.

Lorsqu’il était gamin, Homère Angelopoulos Lacroix (Maxime Denommée) a reçu de son père un livre regroupant les tragédies de Sophocle. Maintenant âgé de 25 ans, il ne s’est jamais vraiment remis de l’impact qu’ont eu ces souvent malsaines histoires d’amour, de trahison et de meurtre sur son jeune esprit. Ainsi, lorsque son chemin croise un jour celui de la belle Roxane (Isabelle Blais), l’esprit de ses lectures se retrouve à influencer sa propre existence…

Avec son étourdissant mélange des genres et les tournures ésotériques de son intrigue, La Belle Empoisonneuse ne fera sûrement pas l’unanimité. Or, c’est justement ce côté éclaté qui donne au film de Richard Jutras son charme. Sans être parfaitement réussie, cette tragicomédie romantique a au moins le mérite d’être originale et de prendre des risques, au lieu de se contenter de recycler des clichés éculés.

En plus de jouer avec certains éléments des tragédies grecques et de l’oeuvre et la vie de Dostoïevski, Jutras multiplie les références à la mycologie. Les champignons jouent ainsi un rôle important dans le récit, que ce soit ceux qui empoisonnent ou ceux qui font halluciner. L’ensemble du film semble d’ailleurs parfois se dérouler sous l’influence des champignons magiques, à commencer par la séquence d’ouverture, qui nous montre Homère étant transporté d’urgence en ambulance alors qu’il pleut du sang sur la ville de Québec!

Si la première scène du film est visuellement saisissante, elle introduit par contre aussi l’insistante narration en voix hors champ qui, bien qu’occasionnellement distrayante, s’avère en général plus agaçante qu’enrichissante. A-t-on vraiment besoin de se faire prendre par la main et tout expliquer en détail? Quand Homère a le coup de foudre pour Roxane, par exemple, les images et le langage corporel des acteurs suffisent pourtant à nous le faire comprendre; que la narration le souligne est superflu.

Parlant des comédiens, la chimie entre ces derniers compense grandement les quelques maladresses de ce premier long métrage. Maxime Denommée et Isabelle Blais, en plus d’être charismatiques, communiquent bien le caractère nébuleux de leurs personnages, qui ne révèlent leur vraie nature qu’au compte-gouttes. Dans le rôle du beau-père de Roxane, Benoît Gouin, le fameux "Michel Gauvin-Mike Gauvin" de Québec-Montréal, offre aussi une performance plus complexe qu’elle n’en a l’air initialement. Soulignons enfin l’hilarante apparition de Robert Lepage en humoriste déchu et amer, un coup de casting génial.

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