Stop-Loss : La guerre, yes sir!
Stop-Loss marque le retour de la réalisatrice de Boys Don’t Cry, Kimberly Peirce.
Une caméra nerveuse se colle aux déplacements de soldats américains pris dans une embuscade en Irak. Ils ne sont pas dans le désert à se défendre contre d’autres fantassins armés jusqu’aux dents, mais dans un édifice à logements où résident des familles d’innocents. Par un montage sur-dynamisé, la nervosité et la peur des Américains envahissent l’écran, se font de plus en plus palpables, puis contagieuses. Ces premières images de Stop-Loss ne laissent aucun doute sur ce que pense Kimberly Peirce de la guerre en Irak: barbare, injustifiée, inutile. Et pourtant, le pire reste à venir.
De retour dans leur Texas natal, quatre camarades d’infanterie sont accueillis en héros. L’un d’eux, Rico (Victor Rasuk, émouvant) a déjà pris le chemin de l’hôpital pour soigner ses horribles blessures, tandis que Tommy (Joseph Gordon-Levitt, impeccable), Steve (Channing Tatum, limité mais convaincant) et Brandon (Ryan Phillippe, très solide) se reconnectent difficilement à la réalité texane en raison de graves séquelles psychologiques. C’est à ce moment du récit que l’on retrouve ce qui faisait la grande force de Boys Don’t Cry. Avec une sincérité remarquable, Peirce trace sans fard ni complaisance le portrait d’un groupe marginalisé, voire paumé, ébranlé à jamais par les actes commis sans en connaître les vraies raisons. Directe et franche, elle ose illustrer, sans pour autant les juger, ses héros sous un jour qui n’est pas complètement flatteur pour eux. Ceux-ci, désarmés, tenteront de donner un nouveau sens à leur vie. Et pourtant, le pire reste à venir.
Révolté d’apprendre qu’il devra retourner sous peu au front, Brandon entreprend de traverser l’Amérique avec Michelle (Abbie Cornish, subtile), fiancée de Steve, afin de convaincre un sénateur de Washington de faire changer d’idée ses supérieurs. Dès lors, la plume de Peirce et de son comparse Mark Richard se fait militante. Et au diable les discours nuancés! Prenant le parti pris du jeune rebelle avec cause, la réalisatrice tire à boulets rouges sur le gouvernement, l’armée et le patriotisme aveugle. Si le dernier tiers du film a du plomb de l’aile en raison des dialogues, pas toujours subtils et prenant de plus en plus de place, Stop-Loss n’en demeure pas moins une réflexion à la fois vibrante, musclée et viscérale sur les raisons d’envoyer des hommes (et femmes) au front.
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