Vues d’Afrique : Entre tradition et modernité
La 24e édition de Vues d’Afrique se poursuit jusqu’au 20 avril. Quelques suggestions.
Réalisateur émérite, Youssef Chahine et son acolyte Khaled Youssef (scénariste d’Alexandrie… New York) livrent un portrait à la fois incisif, mélo et caricatural d’un quartier cosmopolite du Caire dans Le Chaos (Heya fawda). Maître craint et détesté du quartier, un policier corrompu (Khaled Saleh, truculent) rêve d’épouser une jolie institutrice (Mena Shalaby, nunuche) éprise du séduisant substitut du procureur (Youssef el Cherif, correct). Souhaitant s’attaquer au pouvoir en place, le cinéaste égyptien octogénaire dilue la férocité de son message dans une tonne d’excès, à commencer par ses personnages semblant sortir d’un soap américain traduit en arabe, ses situations tirées par les cheveux et ses éléments comiques éculés. Malgré tout, l’ensemble divertit plus qu’il n’agace. (17 avril, Beaubien)
Journaliste camerounaise diplômée de l’INIS, Osvalde Lewat propose un documentaire qui frappe et choque autant que son titre, Une affaire de nègres. Instauré en 2000, le commandement opérationnel avait pour mission de freiner le banditisme dans la région du Douala (Ouest du Cameroun). Or, plus d’un millier d’innocents ont disparu et encore aujourd’hui, leurs familles ignorent tout du sort qu’on leur a réservé. Ponctué de rituels de deuil, Une affaire de nègres suit le combat de maître Momo, courageux avocat des victimes. La conclusion laisse malheureusement entendre que la lutte sera encore bien longue. (18 avril, Beaubien)
Enfin, ayant débuté avec l’éclatant et savoureux Délice Paloma de Nadir Moknèche (présentement à l’affiche), Vues d’Afrique se termine sur une note plutôt sombre mais néanmoins porteuse d’espoir. Drame social où s’affrontent durement les gardiens des croyances ancestrales et les tenants de la modernité – les tenantes, devrions-nous dire, puisque ce sont les femmes qui semblent davantage préoccupées par l’avenir -, Faro, la reine des eaux met en scène un jeune ingénieur (Fili Traoré) revenu dans son village natal afin de connaître l’identité de son père et qui se heurtera bientôt au chef des anciens (le griot Sotigui Kouyate). Moins ambitieux que le Mooladé de Sembène Ousmane (on lui rend hommage à la Cinémathèque québécoise jusqu’au 20 avril) auquel il fait inévitablement penser, ce premier long métrage du Malien Salif Traoré questionne tout autant le désir d’évolution que celui de préserver la tradition. À noter que l’humoriste Michel Mpambara y tient un petit rôle. (19 avril, Impérial)