Maman est chez le coiffeur : L'été de mes 12 ans
Cinéma

Maman est chez le coiffeur : L’été de mes 12 ans

Avec Maman est chez le coiffeur, d’après le scénario à saveur autobiographique d’Isabelle Hébert, Léa Pool renoue avec le monde de l’enfance et les années 60.

Voilà quatre ans que nous n’avions eu le plaisir de voir un film de Léa Pool au grand écran. Quatre années durant lesquelles la réalisatrice a travaillé à l’adaptation de Pilgrim de Timothy Findley et de Cantique des plaines de Nancy Huston. Faute de financement, elle s’est retrouvée à la barre d’une aventure pourtant destinée à un autre réalisateur.

De fait, Maman est chez le coiffeur d’Isabelle Hébert devait être tourné par Louis Bélanger, qui s’est désisté afin de pouvoir réaliser The Timekeeper. Sachant que Léa Pool avait beaucoup aimé le scénario d’Isabelle Hébert, dont elle avait été deux fois la lectrice, la productrice Lyse Lafontaine l’a alors convaincue de prendre le projet sous son aile.

RETOUR AUX SOURCES

Dans la filmographie de Léa Pool, Emporte-moi fait figure de film charnière entre les oeuvres explorant la psyché féminine (La Femme de l’hôtel, Anne Trister, etc.) et celles illustrant l’enfance (Lost and Delirious, Le Papillon bleu). Dix ans après Emporte-moi, la cinéaste signe un film personnel qui s’inscrit dans la lignée de ce sublime long métrage qui avait révélé Karine Vanasse.

"Là où je pense qu’il y a comme un retour à quelque chose, avance la cinéaste à quelques heures de la première mondiale du film à Beloeil, c’est que c’est peut-être la première fois que je me ressens au centre de quelque chose même si ce n’est pas mon scénario."

Abandonnée par sa mère durant trois ans, la réalisatrice ne pouvait qu’être touchée par le récit d’Isabelle Hébert où une jeune fille de 12 ans, Élise (Marianne Fortier), croyant être témoin d’un entretien téléphonique suspect entre son père (Laurent Lucas) et un autre homme, tend le téléphone à sa mère (Céline Bonnier). Dès lors, tout bascule.

TRANQUILLES REVOLUTIONS

Avec la complicité de la scénariste, Léa Pool a apporté quelques modifications au récit, de façon à se l’approprier. Ainsi, elle a voulu donner au père la nationalité française.

"Tous mes films ont une double nationalité, c’est inscrit en moi, raconte celle qui a quitté sa Suisse natale pour le Québec en 1975. J’ai besoin de cette dualité; en même temps, ça permet une certaine distance par rapport au père, qui se retrouve encore plus étranger à la situation en raison de son "étrangeté". En plus, je voulais travailler avec Laurent Lucas que je trouve très beau et très intéressant comme acteur."

C’est à Kigali, lors du tournage d’Un dimanche à Kigali, que Céline Bonnier et Isabelle Hébert, qui y tournait le making of, se sont rencontrées et ont commencé à parler de Maman est chez le coiffeur: "Je n’ai pas cherché à savoir comment était la mère d’Isabelle. Je me suis fiée sur ce qu’elle m’avait raconté au Rwanda. C’est une mère très cérébrale, très organisée. Je la trouvais très loin de moi et c’est ça qui m’intéressait. Je ne me suis même pas posé la question à savoir si c’était un personnage principal ou secondaire. Lorsque j’ai lu le scénario, j’ai compris que de l’abandon de la mère émanait tout de même quelque chose d’aimant et de réconfortant."

TOUS LES GARÇONS ET LES FILLES

N’ayant pas vu Aurore de Luc Dionne, Léa Pool ne connaissait pas Marianne Fortier. Lors de l’audition, elle avoue avoir été "blowée" par son jeu et sa présence à la caméra. Sur la jeune actrice, Céline Bonnier renchérit: "Elle, elle est vraiment bonne! Elle est vraiment mature! Elle est très sérieuse dans le travail. J’avais du plaisir avec elle comme avec une collègue de travail. J’ai été aussi impressionnée par le professionnalisme et l’instinct des autres enfants."

Âgée de 14 ans, celle qui a eu la piqûre du cinéma sur le plateau d’Aurore ne tarit pas d’éloges sur la réalisatrice et ses partenaires adultes: "Léa a vraiment le tour avec les enfants. Ensemble, on a beaucoup discuté de la nature du personnage. Elle demandait aux autres comment ils feraient la scène, ce qui leur permettait d’être plus naturels. C’était super de travailler avec Céline, avec elle, l’émotion est toujours au rendez-vous. J’ai aussi été impressionnée par Gabriel Arcand."

Entre le tournage d’Aurore et celui de Maman est chez le coiffeur, trois ans se sont écoulés. Trois années qui ont permis à Marianne Fortier de passer discrètement de l’enfance à l’adolescence.

"Ça m’a permis de faire une belle transition, d’éviter d’être identifiée à Aurore. J’entre dans une période où il y a moins de rôles, mais ça ne me dérange pas. Mes études sont très importantes, alors je prends mon temps…" conclut sagement celle qui porte Maman est chez le coiffeur sur ses jeunes épaules.

En salle le 2 mai