Infiniment Québec : Si j'avais les ailes d'un ange…
Cinéma

Infiniment Québec : Si j’avais les ailes d’un ange…

Dans Infiniment Québec, Jean-Claude Labrecque rend un hommage senti à sa ville natale à l’occasion du 400e anniversaire de la capitale nationale.

Au cours de sa longue et prolifique carrière, dont on a reconnu l’importance lors du dernier gala des Jutra, Jean-Claude Labrecque a immortalisé plusieurs évènements marquants des dernières décennies, dans des films tels que La Visite du général de Gaulle au Québec, La Nuit de la poésie 27 mars 1970, Jeux de la XXIème olympiade, À Hauteur d’homme et maintenant Infiniment Québec.

"Ça fait longtemps que je l’avais en tête, ce projet-là, se rappelle Labrecque. J’ai essayé de le faire il y a 10 à 15 ans, mais les producteurs ne trouvaient pas ça intéressant… Mais dans la perspective de voir arriver le 400e, on a eu plus de facilité. Des fois, un film, ça se fait parce que c’est un bon timing. Il faut savoir garder les projets et les ressortir quand c’est le temps."

Ayant grandi dans la capitale et y ayant tourné souvent au fil des ans, Labrecque était un choix tout indiqué pour lui rendre cet hommage cinématographique. Directeur photo émérite, il a su capturer la grande beauté de Québec, qu’il attribue autant à son positionnement géographique qu’à son héritage historique. "La lumière est plus belle sur une montagne, d’une part. Et la proximité du fleuve, c’est tellement extraordinaire! Puis en même temps, Québec, c’est une ville historique. C’est excitant, une petite ville comme ça qui dégage une aussi forte présence d’Histoire."

Pour souligner cet aspect, le cinéaste a intégré de nombreux dessins, peintures et photos d’époque à Infiniment Québec. "Les musées m’ont sorti tous leurs vieux trésors, comme les iconographies des années 1600. Et j’ai demandé aux gens de Québec de me passer leurs vieux albums de famille. Puis l’idée, au montage, c’était de mêler les images d’époque avec celles d’aujourd’hui."

Le film possède d’autre part une certaine majesté, un aspect solennel. "Il y a un côté sacré, confirme Labrecque; c’est dans cet esprit-là qu’on a fait le tournage. La musique de Jorane a aussi contribué à sacraliser le film, à donner à Québec une grande allure."

La bande-son inclut aussi des extraits du Concerto de Québec, d’André Mathieu, ainsi qu’une narration en voix hors-champ, ce que réclamait la télévision. "Parce qu’ils sont moins habitués maintenant à juste regarder les choses. Eux autres, leur grand rêve, c’est d’avoir des reportages, des gars qui parlent avec un micro…".

Ce compromis s’est finalement avéré heureux, la narration venant contextualiser le caractère éminemment personnel de l’entreprise. Labrecque y raconte comment, lorsqu’il avait 10 ans, le prince de Bourbon-Parme, dont la famille s’était exilée d’Europe, s’est retrouvé au pensionnat des Soeurs Grises, dans la même classe que lui. Labrecque l’avait alors pris sous son aile et avait entrepris de lui faire découvrir la ville…

Au départ, Labrecque narrait le film lui-même, mais il s’est éventuellement raviser. "Je frisais un peu l’amateur, alors j’ai fait appel à un alter ego, Gilbert Sicotte, et c’est beaucoup mieux!" Il faut dire que l’acteur a de l’expérience dans ce domaine, ayant notamment assuré la narration de Léolo, le chef-d’oeuvre du regretté Jean-Claude Lauzon. "D’ailleurs, quand on enregistrait, j’ai dit à Gilbert: "C’est Léolo; c’est ce ton-là que je voulais.""

Enfin, si on n’entend pas la voix de Labrecque dans le film, on peut par contre brièvement l’apercevoir au détour d’un plan. "J’ai fait un Hitchcock de moi-même! On a tourné au même endroit que son caméo dans I Confess (ndlr: le film que Hitchcock a tourné à Québec en 1952). L’escalier n’est plus pareil aujourd’hui, mais c’est la même place."

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INFINIMENT QUEBEC

Qui de mieux placé pour capturer la beauté de Québec que Jean-Claude Labrecque, qui en est non seulement originaire, mais s’avère aussi être probablement le meilleur de tous les directeurs photo québécois? Infiniment Québec est une succession de compositions visuelles à couper le souffle, où l’on peut admirer non seulement l’inévitable Château Frontenac, le Séminaire et les plaines d’Abraham, mais aussi une foule de recoins fascinants de la ville. Les images tournées l’hiver sont particulièrement superbes, que ce soit le Vieux-Québec sous la neige ou le fleuve couvert de glace. Le film bénéficie par ailleurs de l’intégration d’oeuvres d’art et de photos représentant la ville au fil des siècles, de la narration mêlant Histoire et histoire et, bien sûr, du violoncelle et de la voix aérienne de Jorane. À noter que, en complément de programme, le Cinéma du Parc présentera le tout premier film de Labrecque, 60 cycles (1964), un remarquable court métrage dépeignant le Tour cycliste du St-Laurent.