La Mémoire des anges : Infiniment Montréal
Cinéma

La Mémoire des anges : Infiniment Montréal

La Mémoire des anges, de Luc Bourdon, est une chronique du Montréal des années 1950 et 1960 assemblée à partir d’images d’archives.

Comment réunit-on Oscar Peterson, Dominique Michel, Jean Drapeau, Willie Lamothe, Geneviève Bujold, Paul Anka et une foule d’autres dans un même film? En plongeant tête première dans les archives de l’Office National du Film, ce qu’a fait Luc Bourdon pour en tirer le casse-tête audiovisuel qu’est La Mémoire des anges.

Tout a commencé par une réflexion lancée en l’air par Bourdon, mais que la productrice Colette Loumède a décidé de prendre au sérieux. "J’avais dit: "Pourquoi on continue à tourner? Il y a tellement d’images de filmées, pourquoi on ne s’amuse pas à faire des films à partir de bouts d’autres films?" C’était une boutade, mais en même temps, c’était vraiment un vieux fantasme que j’avais", se rappelle le cinéaste.

Pendant trois ans, Bourdon et son monteur Michel Giroux ont visionné des centaines de films faisant partie de la collection de l’ONF, isolant des passages ici et là afin de bâtir l’imposante banque d’images qui leur a fourni le matériel nécessaire pour créer La Mémoire des anges, dont les motifs récurrents se sont généralement imposés d’eux-mêmes. "C’est sûr que Montréal était tout de suite clairement placée, tout comme l’idée de ponctuer le film de musiques et de chansons, avec les performeurs à l’écran si possible. D’autre part, il y avait tous les univers, tous les regards des années 1950 et 1960 qui m’intéressaient plus que les autres années, à cause du phénomène du candid eye et du cinéma direct."

"Le pari au niveau du son et de l’image, poursuit Bourdon, c’était de n’enregistrer aucune matière, donc de ne faire que de la récupération, du recyclage, du sampling… Puis on s’est mis des règles comme celle de ne jamais reproduire un montage original dans le nôtre, pour ne pas faire de la citation. Souvent, c’était des inserts qu’on prenait dans les films. Il y a des films qui sont très proches de leur sujet mais qui, entre deux séquences, nous montrent du stock shot de la ville; c’était ces plans-là qu’on recherchait. En gros, l’idée était d’essayer de rentrer avec les images dans la fibre urbaine qui était tricotée à ce moment-là."

À voir si vous aimez /
L’Homme à la caméra de Dziga Vertov, Infiniment Québec de Jean-Claude Labrecque, My Winnipeg de Guy Maddin

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LA MÉMOIRE DES ANGES

Faisant usage d’extraits et de chutes de tournage de 120 films produits par l’ONF, Luc Bourdon et son monteur Michel Giroux dressent un portrait impressionniste du Montréal des années 1950 et 1960, tel que capturé par des cinéastes comme Gilles Groulx, Hubert Aquin, Gilles Carle, Denys Arcand, Claude Jutra et de nombreux autres au fil des ans. L’assemblage de ces images en couleur ou en noir et blanc, en 35 ou en 16 mm, tirées de fictions ou de documentaires, est étonnamment homogène, alors que des liens géographiques ou thématiques se tissent entre elles. Exercice un brin académique, La Mémoire des anges comporte néanmoins de véritables moments de grâce, incidemment souvent associés aux chansons du vénérable Raymond Lévesque (Les trottoirs, À Saint-Henri, Bozo-les-culottes).