Eldorado : De par le plat pays
Cinéma

Eldorado : De par le plat pays

Eldorado, de Bouli Lanners, s’aventure sur les routes rurales de Belgique.

Un soir qu’il rentre tard à la maison, Yvan (Bouli Lanners) trouve un malfaiteur tapi sous son lit. Elie (Fabrice Adde) cherche simplement un peu d’argent pour aller rendre visite à ses parents. Les deux hommes parlementent un peu puis s’endorment. Le lendemain, plutôt que d’appeler la police, Yvan décide finalement d’accompagner Elie jusqu’à destination. Une drôle d’amitié est née.

À bord de la Chevrolet septante-neuf d’Yvan, les deux hommes prennent la route. Et quelle route! Chaque carrefour, chaque station réserve une surprise, une rencontre étrange: devin alcoolique, campeur nudiste, vététiste en deuil de son chien… Plus on avance, plus on se demande où nous conduit ce déroutant périple qui n’a vraiment rien d’un parcours fléché. Qu’importe. La destination visée est moins importante que le chemin accompli…

Road movie se réclamant de tous les possibles, aussi farfelus soient-ils, Eldorado avance en territoire fabuleux, comme son titre l’indique, avec pour moteur la quête d’un pays doré, d’un objet mythique, d’une innocence perdue qu’Yvan et Elie cherchent à re-capturer.

Pour rompre toute attache réaliste et ancrer le film dans le mythe, Bouli Lanners, également réalisateur et scénariste, filme la Belgique comme s’il s’agissait d’un nouvel État du Midwest américain. Oubliez la grisaille et le ciel si bas qu’on marcherait le dos courbé. Faites place à de vastes étendues vertes, à un soleil radieux vissé au plafond, à des véhicules automobiles venus des usines de Detroit.

Ce décor sublimé est magistralement photographié par le directeur photo Jean-Paul de Zaeytijd et bien soutenu par la musique "américanisante" de Renaud Mayeur. Belle adéquation entre la forme et le propos.

Cinéaste relativement confidentiel, Bouli Lanners est aussi un acteur occasionnel abonné aux seconds rôles colorés (Les convoyeurs attendent, Quand la mer monte, Astérix aux Jeux olympiques…). Avec l’excellent Fabrice Adde, encore inconnu au bataillon, il forme ici une paire parfaitement complémentaire. Le dodu soupe au lait (Lanners) et le gringalet placide (Adde), un classique.

S’il partage une fibre mélancolique aiguë, le duo n’en est pas moins protégé par son sens de l’absurde. C’est ainsi que, face aux cruelles facéties que lui réserve la fatalité, il avancera bon gré mal gré. Tant qu’il y aura de la gazoline dans le réservoir de la Chevrolet…

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