image+nation : Fierté LGBT
Pour ses 21 ans, image+nation, le doyen des festivals de films LGBT au Canada, offre de vraies perles.
Doté d’un public fidèle et d’une programmation foisonnante, le festival image+nation est un forum de réflexion, d’expression et de célébration essentiel à la communauté LGBT québécoise. Cette année, le menu élaboré par Katharine Setzer et Charlie Boudreau comporte des films et téléfilms drôles et émouvants, des documentaires engagés et éclairants, des courts métrages singuliers et audacieux, mais aussi des oeuvres plus atypiques, qui ne se seraient pas retrouvées au grand écran autrement.
MULLIGANS
C’est malheureusement avec un mauvais film d’adolescents en vacances à la campagne que le coup d’envoi du festival sera donné. Le premier film du Canadien Chip Hale est une ixième histoire de coming out. D’abord, Chase (Charlie David, le Toby de la série inexplicablement culte Dante’s Cove) avoue à son ami Tyler (Derek Baynham) qu’il est gai. Puis le père de Tyler (Dan Payne) – après s’être délecté du corps de Chase – avoue à sa femme (Thea Gill, bien moins convaincante que dans Queer As Folk) qu’il est gai lui aussi. Réalisé et scénarisé sans imagination et sans conviction, le film cherche en vain à nous émouvoir.
SA RAISON D’ETRE
Ce téléfilm du Français Renaud Bertrand (réalisateur de la délicieuse télésérie Clara Sheller) offre 200 minutes de joies et de larmes, une reconstitution historique qui allie l’intime et le collectif pour mieux parler des ravages causés par le sida dans l’Hexagone. Bruno, Isabelle et Nicolas ont 20 ans en 1981. Bruno (Nicolas Gob) aime Isabelle, la soeur de Nicolas. Nicolas (Michaël Cohen), lui, aime Bruno. Le film raconte avec beaucoup de doigté leur relation aux frontières de l’amour et de l’amitié, leur combat contre la maladie, leur transgression des barrières raciales, de classe sociale et d’orientation sexuelle.
LE NOUVEAU MONDE
Ce téléfilm du Français Étienne Dhaene est une adaptation de Mais qui va garder le chat?, le deuxième roman d’Éliane Girard, publié chez Lattès en 2005. Lucie (Natalia Dontcheva) et Marion (Vanessa Larré), deux jeunes et dynamiques lesbiennes, ont décidé de se lancer dans la grande aventure de la conception, un périple qui va sérieusement remettre en question leur vie de couple. Grâce à Hugo (Grégory Fitoussi), le gentil donneur de sperme qui habite Montréal, et aux parents de Lucie (Alain Doutey et Danièle Evenou), des soixante-huitards vieillissants un peu cinglés, sans oublier la mère ultra-catho de Marion (Andréa Ferréol), le film est drôle et plein de spectaculaires rebondissements. En somme, un excellent feel-good movie.
SEX POSITIVE
Ce documentaire, le premier que signe le jeune États-Unien Daryl Wein, nous replonge dans une époque où il fallait expliquer au grand public, aussi bien qu’aux gais, que ce n’est pas le sexe qui rend malade, mais bien la maladie. Le film est un portrait fascinant de Richard Berkowitz, un activiste du sécurisexe dont les actions, pourtant majeures, sont tombées dans l’oubli. Truffé d’exceptionnelles images d’archives, le film brosse avec rigueur et sensibilité le portrait de cette ère tragique où une peste mortelle décimait, divisait et stigmatisait la population gaie de New York.
GAY… ET APRES?
Le Français Jean-Baptiste Erreca a rassemblé six documentaristes pour réaliser cette enquête passionnante sur les luttes LGBT aux quatre coins du monde. De Madrid à New York, en passant par Berlin, Cuba et Paris, le film interroge l’identité gaie en 2008. Est-ce qu’il y a encore un combat à mener? Serions-nous entrés dans une ère post-gaie? Dans les histoires des personnes interrogées, on réalise que la nouvelle génération se définit souvent de manière radicalement différente. L’appartenance à un groupe ne se fait plus strictement sur la base des préférences sexuelles; le Web, l’origine ethnique et les allégeances politiques sont aussi de puissants facteurs de ralliement.
OTTO; OR, UP WITH DEAD PEOPLE
Avec ce film, le réalisateur canadien Bruce LaBruce (Hustler White, Raspberry Reich) risque de semer une nouvelle fois la controverse. Il s’agit d’une histoire de zombie, plutôt gore, mais aussi d’un pamphlet politique et d’une histoire d’amour. Nous sommes sur les traces d’Otto (Jay Crisfar), un jeune zombie à qui la cinéaste underground Medea Yarn (Katharina Klewinghaus) va offrir un rôle qui lui colle à la peau, celui d’un zombie. Le style de LaBruce est inimitable, cruel et pourtant romantique, dégoûtant (les zombies ont un appétit dévorant pour les boyaux humains) et pourtant poétique, nostalgique. Mentionnons que LaBruce donnera une leçon de cinéma durant le festival.
Aussi à surveiller dans la première semaine: Another Gay Sequel: Gays Gone Wild!, de Todd Stephens, la suite du désopilant Another Gay Movie; Dolls, de Karin Babinska, un film qu’on décrit comme une version plus imprévisible, plus mordante et, surtout, plus charnelle de Quatre filles et un jean; Annie Leibovitz: Life Through Lens, un documentaire réalisé par la soeur de la célèbre photographe; et finalement Une robe blanche, un court métrage du Québécois Dominic Goyer sur cet univers trouble qu’est la famille.