Entre nous et nulle part : Chaque film est un combat

Anh Minh Truong a véritablement commencé sa carrière de réalisateur en 2002 après avoir été moult fois récompensé à Vidéaste recherché(e). En 2005, sa victoire à Silence on court! à Cannes lui permet d’infiltrer l’univers du vidéoclip. Ensuite, c’est un passage remarqué à l’émission Fais ça court! en 2007 qui lui ouvre les portes du monde de la pub. Avec son nouveau film, Entre nous et nulle part, le Sherbrookois continue de paver sa voie vers un autre niveau de reconnaissance.

Plusieurs considèrent Anh Minh Truong comme l’ambassadeur du cinéma en Estrie. Alors que sa carrière connaît un nouvel essor, il persiste à vouloir faire les choses à sa façon… et dans les Cantons-de-l’Est. "Je peux comprendre ceux qui vont à Montréal, avoue-t-il. Moi, je me sens mieux ici. Même d’un point de vue artistique, je suis plus du genre à filmer des champs vides que la ville. De plus, peut-être que je ne ferais pas de film si c’était facile."

Il faut donc avoir le goût du défi et la fibre entrepreneuriale pour vivre du septième art en région. Selon le réalisateur, chaque film est un combat parce qu’il faut éduquer à toutes les fois. "Le cinéma, c’est sûrement la forme d’art la plus dispendieuse. Quand on produit un moyen métrage en région, certains considèrent ça comme une oeuvre mineure. C’est une erreur de jugement. Un projet comme Entre nous et nulle part, c’est autant de travail que deux ou trois pièces de théâtre."

SUR LA ROUTE

Scénarisé par Jean-Philippe Boudreau, Entre nous et nulle part suit le road trip de Steve (Alexandre Leclerc), Paul (François Bienvenue) et Nathalie (Ariane Bisson McLernon) qui, pour des raisons diverses, décident de se rendre jusqu’à un bled du nom de Sherbrooke qui existe réellement aux États-Unis, dans le Dakota du Nord. "On parle d’une oeuvre grand public, un feel-good movie avec beaucoup d’humour de situations, explique Truong. C’est du gros bonbon. Même, encore, je ris toutes les jokes."

Le moyen métrage de 40 minutes compte un quatrième personnage principal, soit la rutilante Brown Queen. "C’est une véritable van de road trip; elle a déjà fait la route 66", précise le réalisateur, fier de sa trouvaille.

Peut-on parler d’un film de genre? "Oui. Le road movie, c’est un genre en soi. On y suit la crise existentielle de personnages qui s’en vont vers un "nulle part" physique et personnel, et à la fin, c’est on the road again."

LE REGARD D’ARIANE

Dans Entre nous et nulle part, le rôle de Nathalie, une anglophone de la Colombie-Britannique, fut conçu tout spécialement pour Ariane Bisson McLernon, car en plus de parler un anglais impeccable, elle est tout particulièrement photogénique au dire du réalisateur: "Cette fille, elle looke à la caméra!"

Quant à la comédienne, elle aussi n’a que de bons mots sur le travail d’Anh Minh Truong: "C’est facile de se sentir à l’aise avec lui. Il donne des directives très précises; il sait où il s’en va. C’est un charme pour l’équipe de jeu parce qu’on peut vraiment se laisser aller."

Faisant principalement carrière en théâtre jeunesse, cette jeune comédienne originaire de la région joue également dans Un pas de deux, une autre réalisation d’Anh Minh Truong. Présenté en mai prochain à la Biennale de Montréal, ce court métrage (qu’on pourra éventuellement voir en Estrie) est une oeuvre sans dialogue; tout passe grâce à la musique et au regard d’Ariane, qui interprète une serveuse troublée par la présence d’un client. "Le film se veut contemplatif, explique-t-elle. C’est un personnage tout en nuances. Il fallait jouer la non-action, le désir… Le fait qu’elle soit un peu timide m’a fait du bien parce que dans Entre nous et nulle part, je joue une extravagante qui a de la parlote et les idées un peu folles."

Ce contraste ne surprend guère, car Anh Minh Truong ose les extrêmes dans son art. Personne ne s’en plaindra, pas même la Brown Queen.

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