RIP: A Remix Manifesto : Du copyright au copyleft
Cinéma

RIP: A Remix Manifesto : Du copyright au copyleft

Dans RiP : A remix manifesto, Brett Gaylor s’intéresse aux vicissitudes de la génération copyleft, celle des remixeurs qui sont dans le collimateur des géants de l’industrie du divertissement, gardiens du copyright.

Si Girl Talk, le petit génie américain du sampling, devait payer les droits des micro-extraits de musique qu’il utilise comme matière première lorsqu’il compose (ou plutôt assemble) ses pistes, son album lui coûterait près de quatre millions de dollars, qu’il devrait verser à des compagnies de disques, des éditeurs, des artistes. Mais s’il pratique l’échantillonnage, il n’en est pourtant pas moins un créateur de musique originale.

C’est ce paradoxe, aussi vieux que le hip-hop, mais qui n’est toujours pas résolu, qui a poussé Brett Gaylor à étudier la question de la propriété intellectuelle, des droits d’auteur et du dialogue de sourds qui existe entre des géants de la musique, le grand public et une nouvelle catégorie d’artistes. "Le cas de Girl Talk m’a semblé être un excellent point de départ, d’abord, parce qu’il utilise des échantillons, mais aussi parce qu’il y a quelque chose de très participatif dans la manière dont il interagit avec la foule à ses concerts."

PROTEGER LA CULTURE DU RECYCLAGE

"Les droits d’auteur ont été inventés au 19e siècle pour favoriser la créativité et l’innovation, rappelle le documentariste. Le fait que des créateurs, des chercheurs, des artistes soient rémunérés à leur juste valeur a été un grand pas en avant. Mais aujourd’hui, il y a des abus de la part de multinationales qui tentent, par tous les moyens, de contrôler les nouvelles habitudes de consommation et de création culturelle."

En bref, la technologie évolue plus vite que le droit. "Saviez-vous que la mélodie de Joyeux Anniversaire n’est pas libre de droits! Dans mon film, je cite beaucoup d’exemples d’Américains qui se sont fait traîner en cour parce qu’ils ont utilisé leurs musiques préférées pour accompagner des vidéos de famille."

Selon Gaylor, nous jetons aujourd’hui les bases d’une culture du recyclage, du détournement, du remix qui terrorise les grands groupes. "Il est donc ironique de voir des multinationales comme Sony fabriquer d’une main des ordinateurs et des logiciels d’édition sonore, et de l’autre, poursuivre les gens qui utilisent ce genre d’outils. Ce que j’aimerais voir, c’est un vrai débat. Dans le cas d’artistes comme Girl Talk, pourquoi ne pas considérer les échantillons comme des covers? Cela coûterait moins cher, et les artistes seraient prêts à payer. Il est temps d’établir une structure de droits abordables qui favoriserait la créativité, évitant que des artistes ne se retrouvent dans la clandestinité."

Pour donner l’exemple, Gaylor livre son film en pâture aux remixeurs. "Nous allons rendre publiques des images du film, libres de droits, que le public pourra remonter à sa guise. C’est une approche qui au bout du compte vient enrichir le projet. Ce n’est pas parce que quelqu’un retravaille mon film à sa manière qu’il ne viendra pas voir ma version sur grand écran."