Bellamy : Il n'y a d'honnête que le bonheur…
Cinéma

Bellamy : Il n’y a d’honnête que le bonheur…

Bellamy est la première collaboration entre le vénérable Claude Chabrol et le non moins respectable Gérard Depardieu.

Critique implacable de la petite et de la grande bourgeoisie, observateur malin de l’homme et de ses travers, cinéaste et metteur en scène à l’oeil aiguisé: voilà Claude Chabrol, incontournable monstre du cinéma français. À son bilan, plus d’une cinquantaine de longs métrages répartis sur six décennies. Du lot, plusieurs films cultes, et toujours cette vision d’auteur qui transcende l’écran de cinéma, amoureusement, pour rappeler la belle époque des Cahiers du cinéma, et encore de la Nouvelle Vague française.

Pourtant, dans les nombreux films qu’il a réalisés au cours de toutes ces années passées derrière la caméra, jamais le nom de celui qui a fait office de visage du cinéma français au cours des dernières décennies n’est apparu chez Chabrol.

"Nous étions sur le plateau d’une émission de télévision, Gérard Depardieu et moi, dit Chabrol d’entrée de jeu, et nous nous disions: c’est vraiment bête de n’avoir jamais travaillé ensemble! Les projets que nous avions eus dans le passé étaient morts d’eux-mêmes, ou étaient tous tombés à l’eau. À la suite de cette rencontre, j’ai écrit Bellamy avec cette idée en tête: tourner avec Gérard."

Depardieu, que l’on a pu voir récemment aux côtés de Marc-André Grondin dans Bouquet final, tient ici le rôle-titre de l’inspecteur Paul Bellamy, commissaire de renom séjournant temporairement à Nîmes avec sa femme (Marie Bunel), qui est inopinément abordée par un homme mystérieux (Jacques Gamblin) qui lui dit avoir tué quelqu’un, et qui lui demande sa protection. Les choses se compliquent encore pour lui lorsque son frère cadet (Clovis Cornillac) jette l’ancre dans sa maison.

"Bellamy, c’est un hommage aux deux Georges, confie-t-il au bout du fil. À Brassens, bien sûr, dont l’ironie plane constamment au-dessus du film, mais surtout à Simenon. D’ailleurs, Bellamy, c’est un peu – beaucoup – Maigret!"

Impossible de contredire cette apparente filiation, surtout lorsqu’on considère l’intérêt empreint d’humanité que porte Bellamy à ce criminel qui se présente à lui et lui demande son aide: "Bellamy est évidemment intéressé par cet homme aux visages multiples, surtout parce qu’il a l’impression que cela va l’aider à résoudre ses problèmes à lui: sa relation tendue avec son frère, sa femme, qui s’éloigne de plus en plus… Tout cela force Bellamy à regarder en face sa propre situation, et à affronter ses fantômes."

Le cinéaste avoue s’être inspiré, en outre, de faits divers réels pour construire la trame narrative de son dernier film: "Il y a une scène particulière dans laquelle un avocat chante sa plaidoirie. En fait, il s’agit d’une chanson de Brassens. Un avocat a déjà fait ça, vous savez… Ces événements mystérieux sortent de la réalité, alors que tout ce qui traite de la vie de Bellamy – le banal, le quotidien – relève du domaine de la fiction."

Amusante ironie, et encore objet de théorisation de l’objet cinéma qui s’inscrit parfaitement dans la logique du cinéaste-auteur que l’on connaît. Même à 79 ans, parions que Claude Chabrol est toujours à la recherche d’une nouvelle révolution à accomplir…

À voir si vous aimez /
Murder on the Orient Express de Sidney Lumet, la série télé Colombo

BELLAMY

Avec Bellamy, le cinéaste français Claude Chabrol présente un film lassant qui n’arrive jamais à se remettre totalement des prestations en dents de scie offertes par ses principales vedettes. Clovis Cornillac est particulièrement pénible dans la peau d’un Jacques Lebas parfaitement niais et imbécile, et prouve à nouveau qu’il est un acteur terriblement surévalué. Les insuffisances scénaristiques volontairement construites par Chabrol et sa coscénariste, Odile Barski, que la mise en scène aurait théoriquement dû arriver à pallier, se révèlent, au pire, des insignifiances, au mieux, des anecdotes. Sobre jusqu’à l’excès, la réalisation n’aide en rien l’ensemble, qui se pose sur l’écran de cinéma comme un Boeing qui n’arriverait jamais à décoller d’une piste invisible. Bellamy n’est pas un grand Chabrol. Ce n’est même pas un Chabrol moyen. C’est un film raté. Dommage…