Le Facteur cultivé : Le spectateur d'or
Cinéma

Le Facteur cultivé : Le spectateur d’or

Le cinéaste de fer de Jonquière, Pierre Demers, met des gants de velours dans son nouveau court métrage, Le Facteur cultivé. Un film touchant sur un personnage plus grand que nature.

La plus grande force du nouveau film de Pierre Demers réside dans le choix de son sujet. Henri-Louis Renaud, celui qu’on a surnommé dans le milieu artistique le "Facteur culturel", parfois le "Facteur cultivé", a enfin toute l’attention qu’il mérite.

On apprend à connaître avec stupéfaction ce pilier indélogeable du paysage culturel jonquiérois. "Il n’a l’air de rien…" lance Pierre Dumont (artiste et créateur du Festival des musiques de création). Force est d’admettre qu’avec ce court métrage, il n’en aura plus jamais l’air.

Si ses yeux sont plus fatigués, si son corps prend de l’âge, on n’arrête pas un facteur de marcher. Quand c’est ce qu’on a fait toute sa vie, la retraite n’y change rien. Et quand toute sa vie on a été curieux de culture, c’est une passion qui ne saurait faiblir.

Avec la participation de Claude Bérubé (cinéaste, entre autres de L’Incroyable Histoire des machines à pluie), Pierre Dumont (qui signe aussi la musique du film de Demers) et Guylaine Rivard (comédienne, metteure en scène et directrice du Théâtre CRI), on apprend tout le respect que le milieu accorde à cet illustre inconnu. Si dans La Vie d’factrie, le personnage de Clémence Desrochers n’était pas sujet à chanson, la vie de facteur aura fait de Renaud une matière idéale pour ce film.

Sans être un chef-d’oeuvre – la caméra est souvent instable, la sonorisation parfois déficiente -, le résultat est une production touchante, à mille lieues du ton pamphlétaire de la série des Nous sommes tous des Jean Tremblay. À voir absolument lors de sa présentation en grande première pendant la soirée des Poèmes animés.

Le 10 décembre
Au Côté-Cour

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LE FACTEUR CULTIVE

Cette fois, on ne parle pas d’un spectacle mais d’un spectateur, infatigable amateur d’art. D’autres voix du milieu de la culture s’élèvent pour rendre hommage à Henri-Louis Renaud.

Marie Villeneuve (comédienne)

"Il a tout vu, ce monsieur-là, ce que nous avons joué, filmé… Dans les salles, qu’il y ait succès ou non, il y a toujours le facteur… Il y a quelque chose de rassurant à le voir quand on est sur scène. Il est notre plus grand spectateur et le plus humble. Bravo et merci à notre Facteur culturel…"

Serge Lapierre (scénographe)

"Cet homme est complètement habité par le spectacle auquel il assiste. Il fredonne même les airs qu’il ne connaît pas! Je dirais qu’il voit à peu près tout ce qui se fait ici et a développé un intérêt marqué pour la marionnette. Il suit le Festival depuis des années et je le vois régulièrement quand La Rubrique en diffuse un spectacle."

Lyne L’Italien (codirectrice générale du Théâtre La Rubrique)

"Je sais qu’il assistait à tout, mais absolument tout à une certaine époque: spectacles de musique actuelle, autant que de l’Orchestre symphonique, ciné-clubs, expositions, vernissages, théâtre et pour enfants et pour adultes, et j’en passe… Mais c’est un homme très solitaire. Je ne connais pas grand monde qui le connaît personnellement! Depuis quelques années, je crois que son état de santé l’empêche d’en faire autant qu’il le voudrait…"

Dany Lefrançois (comédien, manipulateur)

"Il y a une dizaine d’années, lors de ma première expérience professionnelle sur les planches au Saguenay, on m’a présenté celui qu’on nommait affectueusement le Facteur culturel, cet homme spectateur assidu à toute manifestation culturelle. En regardant le livre des réservations, nous étions toujours heureux de savoir que le Facteur culturel assistait au spectacle. Nous acceptions d’avance que sa sonore toux caractéristique allait faire partie de la représentation, car il avait sa place parmi nous.

Les quelques moments d’échange que j’ai pu avoir à l’issue d’un spectacle avec cet homme cultivé sans être intellectuel m’ont souvent fait sentir que pour lui l’important n’était pas d’avoir aimé ou non, mais que l’essentiel résidait dans le fait d’y avoir assisté.

Il était grand temps que quelqu’un immortalise cet homme important dans le paysage culturel régional! Bravo!!"