Youth in Revolt : La vie en gauche
Cinéma

Youth in Revolt : La vie en gauche

Dans Youth in Revolt, adaptation du roman-culte de C.D. Payne par Miguel Arteta, Michael Cera incarne le malaise adolescent des années 90.

En lisant Youth in Revolt après avoir vu le film de Miguel Arteta (The Good Girl, Chuck & Buck), il est impossible de séparer Nick Twisp de George Michael Bluth d’Arrested Development, d’Evan de Superbad et de Paulie Bleeker de Juno: "Essayez de ne pas penser à moi quand vous lirez le livre", a lancé Michael Cera en apercevant une copie de Youth in Revolt dans notre sac au dernier Festival de Toronto.

En personne, Cera s’avère une version plus contenue des personnages qu’il incarne à l’écran: nerveux, vif, maladroit, sans doute enclin à dissiper le malaise par l’humour, bien qu’il ne l’ait pas fait au cours de l’entrevue. En fait, il semblait vouloir parler davantage du livre de C.D. Payne que du film dont il tient le rôle principal.

"C’est tellement drôle, a-t-il expliqué, ça prend plusieurs directions et tout porte ses fruits, ce qui est vraiment impressionnant étant donné le nombre de trucs impossibles imaginés par Payne. On se sent vraiment en confiance entre ses mains; je crois que c’est là la marque d’un bon auteur. Ce que j’aime surtout, c’est qu’il ne s’adresse pas à nous de manière condescendante et qu’il n’essaie pas de parler comme un ado. Ça peut devenir un problème pour moi si, en lisant un scénario, le personnage apparaît faussement naïf parce qu’il est adolescent. Il n’y a pas beaucoup de naïveté dans Youth in Revolt."

Michael Cera aime tellement le roman qu’il a lui-même beaucoup contribué à son adaptation, bien qu’il ne soit pas crédité comme scénariste pour ce film où son nom apparaît pour la première fois en haut de l’affiche. Très semblable aux autres personnages incarnés par Cera, Twisp a une capacité presque insoutenable à canaliser tout ce qui est insupportablement embarrassant dans le fait d’être un jeune homme à travers son enveloppe suintante, crispée et glabre.

En fait, presque glabre puisque Nick Twisp partage l’écran avec un alter ego nommé François Dillinger, fumeur de Gauloises à la chaîne, engoncé dans un pantalon trop court, portant une fine moustache à la mode Montparnasse de 1959, qui tourne en dérision et dirige les manoeuvres du jeune Twisp avec les dames.

À la manière d’un George Clooney, bien que totalement différent dans sa contenance, Michael Cera fait peu d’efforts pour devenir ses personnages à l’écran. Jusqu’à maintenant, il n’a pas tourné dans un film d’époque ou une histoire d’amour impliquant des défis de transformation.

"Cela ne m’intéresse pas vraiment parce que je ne crois pas que les choses se passent ainsi au cinéma, a répondu Cera. On me propose des choses, on écrit des choses, et moi, j’ai tendance à travailler avec les cinéastes en qui j’ai confiance. Alors vraiment, tout dépend du réalisateur plus que du rôle lui-même. En fait, je ne voudrais certainement pas ne pas prendre de risques, mais je ne veux pas d’un rôle qui serait faux de façon distrayante. Dans un film, je suis l’un des éléments racontant l’histoire; je ne dois donc pas le faire pour mon propre bien."

Certes, mais n’aurait-il pas été plus plausible que l’alter ego de Nick Twisp ait un accent français, considérant le fait qu’il est Gaulois? Cera n’est pas d’accord, avançant qu’il n’est pas Français, mais le fruit de son imagination et qu’il a consciemment choisi de limiter son maniérisme: "Ce personnage, qui porte la moustache et un pantalon serré, est difficile à gober, alors j’ai pensé que l’accent serait vraiment de trop."

À voir si vous aimez /
Napoleon Dynamite de Jared Hess, Les Beaux Gosses de Riad Sattouf, Nick and Norah’s Infinite Playlist de Peter Sollett

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YOUTH IN REVOLT

Âgé de 16 ans, vivant avec sa mère (Jean Smart) et son petit ami du moment (Zach Galifianakis), le sage et réservé Nick Twisp (Michael Cera) déteste son existence et craint de mourir puceau. Durant les vacances d’été, sa vie prend un autre tournant lorsqu’il croise Sheeni Saunders (Portia Doubleday), rebelle de bonne famille et francophile jusqu’au bout des ongles. Dès lors, Nick et son alter ego fantasque François Dillinger (Cera) feront les 400 coups pour ravir le coeur de la belle.

Reposant en grande partie sur le charme et le talent de Michael Cera, toujours d’un naturel déconcertant en ado mal dans sa peau, Youth in Revolt de Miguel Arteta n’a, malgré son titre inspiré de L’Homme révolté de Camus, rien de bien subversif. Certes, il y aura de lourdes pertes matérielles, mais on est bien loin des jeunes délinquants de A Clockwork Orange… Toutefois, l’ensemble se laisse regarder avec grand plaisir tant le tout y est raconté tambour battant. Qui plus est, les réflexions et observations que le jeune garçon couche dans son journal sont plus souvent qu’autrement hilarantes et allumées. S’ajoutent avec bonheur un générique en stop motion, quelques séquences animées et tubes français pour pimenter le tout. (M. D.)