Creation : Demain les hommes
Cinéma

Creation : Demain les hommes

L’acteur américain Paul Bettany se métamorphose en Charles Darwin dans Creation, du Britannique Jon Amiel.

Impossible d’oublier que l’année 2009 marquait le 150e anniversaire de la publication du traité De l’origine des espèces de Charles Darwin, tellement l’événement a été récupéré, pour des raisons inégalement vertueuses, dans l’ensemble des domaines culturels. Ces entreprises florissantes, mais également éphémères, ont déjà commencé à laisser derrière elles des vestiges quelconques, preuves des lois impitoyables de la sélection naturelle…

Creation, du Britannique Jon Amiel, est le long métrage de fiction inévitable que l’on attendait sur Darwin et qui allait, selon toute vraisemblance, suivre le chemin déjà tracé par ses prédécesseurs. Le biologiste Charles Darwin (Paul Bettany), à la suite de la mort de sa fille Annie (Martha West, resplendissante), est assailli par des problèmes de santé multiples, qui le détournent de ses travaux sur l’origine des espèces. Littéralement incapable d’accepter la mort de sa fille, il erre en son monde comme un fantôme, surtout depuis qu’il a fait le choix d’exclure de ses croyances l’existence d’un dieu omnipotent, qui réglerait l’univers comme un horloger. Emma (Jennifer Connelly), sa femme, tente cependant désespérément de l’extirper de ses ténèbres fantasmatiques…

Ce drame biographique, inspiré du bouquin Annie’s Box de Randal Keynes (l’arrière-arrière-petit-fils de Darwin…), se concentre principalement sur les relations humaines qui relient le biologiste à sa famille, en faisant du coup le choix de s’éloigner de ses propres prémisses, qui devaient être de comprendre la nature de cet homme qui se condamnait lui-même, au nom de la science, au statut d’hérétique. Si la relation qui unit Darwin à sa fille génère, malgré tout, quelques-unes des scènes les plus intéressantes du film, cela se gâte plutôt fortement lorsque leurs rapports deviennent impossibles. On sombre alors dans un drôle de mélodrame qui enchaîne les séquences pathétiques, et qui nous éloigne, encore et encore, de notre sujet central.

Alors, Darwin ne semble plus savoir où donner de la tête, tout comme Paul Bettany, qui semble aussi surpris que nous, et que son personnage, d’être devenu le plus improbable des martyrs. Autrement, une question se pose encore: quelle place fait-on à la nature, dans ce film qui aurait certainement dû faire de l’explicitation, sinon de sa beauté, au moins de ses raisons, le pivot central de son récit? Malheureusement, si peu de place qu’on ne peut considérer que comme légitimes et normales les suffocations récurrentes de ce Darwin visiblement mal à son aise en être domestiqué, à un cheveu de la folie…

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