Festival de Cannes : L'année Juliette
Cinéma

Festival de Cannes : L’année Juliette

Le 63e Festival de Cannes s’est terminé avec l’annonce d’un palmarès contenant quelques évidences et d’étonnantes surprises. Après tout, c’était Tim Burton qui présidait le tout.

Visage de cette 63e édition, il semblait écrit dans le ciel que Juliette Binoche allait être sacrée meilleure actrice au Festival de Cannes. Dès la présentation de Copie conforme d’Abbas Kiarostami, son nom courait sur toutes les lèvres. Au sommet de sa beauté et de son talent, mis en valeur par le superbe village de Toscane où est campée l’action, l’actrice française, qui a versé quelques larmes lorsqu’on a annoncé que le cinéaste iranien Jafar Panahi avait entrepris une grève de la faim, lors de la conférence de presse du film, porte sur ses gracieuses épaules cette comédie romantique aussi charmante que déroutante.

Le Prix d’interprétation masculine a été remis à deux acteurs s’étant démarqués dans des rôles pour le moins similaires. Dans le sombre Biutiful d’Alejandro González Iñárritu, Javier Bardem livre une prestation magistrale en père de famille monoparentale aidant illégalement des immigrants clandestins. Dans le lumineux La Nostra Vita de Daniele Luchetti, Elio Germano est d’un naturel éblouissant en père de famille nouvellement veuf travaillant dans la construction où tout n’est pas blanc.

Ayant signé le délicat et raffiné Poetry, où une charmante mamie aux réactions inattendues (délicieuse Yun Junghee) apprend que son petit-fils est en partie responsable du suicide d’une jeune fille, Lee Chang-dong a mis la main sur le Prix du scénario. Il est vrai que malgré quelques errances, Poetry est racheté par une finale bouleversante d’une logique implacable.

Porté aux nues par la critique française, mais moins bien reçu par la critique internationale, Tournée de Mathieu Amalric a gagné le Prix de la mise en scène. Tim Burton a sans doute craqué pour les colorées danseuses de new burlesque qui, avec leur panache, pourraient très bien lui inspirer de nouveaux personnages. En plus de ce prix, Mathieu Amalric a récolté celui de la FIPRESCI, qui a également salué Adrienn Pal d’Agnes Kocsis (Un Certain Regard) et Vous êtes tous des capitaines d’Oliver Laxe (Quinzaine des réalisateurs).

Premier film tchadien en compétition dans l’histoire du festival, L’Homme qui crie de Mahamat-Saleh Haroun s’est vu remettre le Prix du jury. Réalisé dans des conditions difficiles, ce courageux long métrage raconte le douloureux sacrifice d’un père (Youssouf Djaoro) pour sa patrie.

Pressenti par bon nombre de critiques pour la Palme d’Or, l’austère et superbe film de Xavier Beauvois, Des hommes et des dieux, qui raconte, sans les déifier, les derniers jours des moines français assassinés en Algérie en 1996, a dû se contenter du Grand Prix. Le film mettant en vedette Lambert Wilson et Michael Lonsdale a reçu le Prix du jury oecuménique, qui a aussi décerné deux mentions spéciales, à Another Year de Mike Leigh, l’un des grands favoris de la compétition, et Poetry de Lee Chang-dong.

Coup de théâtre s’il en est un, c’est le fracturé, dépaysant, esthétique et poétique Oncle Boonmee celui qui se souvient de ses vies antérieures d’Apichatpong Weerasethakul qui a remporté la très convoitée Palme d’Or. Les spectateurs l’ayant vu tentent encore de recoller les morceaux du casse-tête…

Pour sa part, l’éclaté et ludique Ha Ha Ha d’Hong Sang-soo a fait l’unanimité du jury et récolté le prix Un Certain Regard. Présidé par Claire Denis, le jury a aussi couronné Octubre de Daniel et Diego Vega, l’un des chouchous de cette catégorie, de même que le trio d’actrices de Los Labios d’Ivan Fund et Santiago Loza, Adela Sanchez, Eva Bianco et Victoria Raposo.

Bouffée d’air frais dans la catégorie Un Certain Regard, Les Amours imaginaires de Xavier Dolan a récolté le prix Jeune regard, en plus d’avoir été l’un des films les plus populaires au Marché du film, où plus d’une quarantaine de pays en ont fait l’acquisition.

Remise pour la première fois à Cannes, la Queer Palm a été décernée à Kaboom de Gregg Araki, qui raconte les tribulations d’un étudiant bisexuel (Thomas Dekker) croyant avoir été témoin d’un meurtre sanglant. Créée par Franck Finance-Marudeira, cette distinction est le pendant du prix Teddy, né en 1987 au Festival de Berlin, et du Queer Lion, remis depuis 2007.

Découvrez le palmarès complet sur www.festival-cannes.com.