Jennifer Lawrence / Winter’s Bone : Sans toit ni loi
Grand Prix du jury et Prix du scénario à Sundance, Winter’s Bone, de Debra Granik, met en vedette une jeune actrice à surveiller, Jennifer Lawrence.
À cause de sa crinière blonde, de ses yeux liquides et de ses traits délicats, Jennifer Lawrence a bien failli ne pas obtenir le rôle de Ree Dolly, jeune habitante des monts Ozarks à la recherche de son père, dans Winter’s Bone de Debra Granik (Down to the Bone).
"On me trouvait trop jolie, confie l’actrice de 19 ans au bout du fil. J’ai donc pris le red eye ("vol de nuit") pour repasser l’audition et ç’a marché! Un truc à retenir pour les actrices!"
Originaire du Kentucky, où elle a vécu jusqu’à l’âge de 14 ans, Lawrence, déjà pressentie pour l’Oscar de la meilleure actrice l’an prochain, se sentait des affinités avec cette jeune fille du Missouri créée par le romancier Daniel Woodrell.
"Mon existence était totalement différente de celle de Ree, mais j’avais l’impression de la comprendre plutôt bien même si on ne se ressemble pas du tout. À cause de mon métier que j’exerce depuis quelques années, j’ai été comme elle confrontée tôt au monde adulte."
Rompue aux rôles sombres, tels que ceux qu’elle a tenus dans The Poker House de Lori Petty (prix d’interprétation à Los Angeles) et The Burning Plain de Guillermo Arriaga (prix Marcelle-Mastroianni à Venise), celle que l’on verra bientôt au côté de Mel Gibson dans The Beaver de Jodie Foster poursuit: "Je crois que ces rôles ont le plus de profondeur, ce sont ceux qui me parlent le plus. Ce qui m’attirait chez Ree, c’était sa force et le fait qu’elle n’accepte jamais un non comme réponse. Elle sait se tenir debout comme toute fille de 17 ans devrait le faire dans de telles circonstances."
Au cours du tournage, où elle lisait le roman au fil des scènes à jouer, Jennifer Lawrence a facilement créé des liens avec les montagnards du Missouri: "J’ai été attirée par Winter’s Bone parce qu’il s’agissait pour moi d’un western moderne campé dans un univers avec lequel j’étais familière. Ces gens mènent une existence difficile, certains ont de graves problèmes de toxicomanie, mais avec Debra, nous avons fait bien attention de ne pas les juger, de ne pas illustrer leur vie de façon négative ni positive, pas plus que de manière exagérée."
À voir si vous aimez /
Deliverance de John Boorman, Into the Wild de Sean Penn, The Timekeeper de Louis Bélanger
Winter’s Bone
D’une remarquable facture naturaliste, cet éprouvant récit initiatique donne à voir une Amérique que le cinéma hollywoodien tend à renier. De fait, l’univers de misère, où même la tendresse se fait brutale, de Winter’s Bone n’est pas sans rappeler celui de Deliverance de John Boorman sauf que chez Debra Ranik, ce n’est pas à travers un regard citadin qu’on le découvre mais bien de l’intérieur. Fortement secondée par John Hawkes et Dale Dickey, la prodigieuse Jennifer Lawrence y incarne une courageuse montagnarde qui devra retrouver son père, trafiquant de crystal meth, ou prouver la mort de ce dernier, afin que les autorités ne saisissent la maison familiale qu’il a hypothéquée. Maintenant la tension jusqu’à la conclusion, Ranik livre une puissante étude de moeurs où évoluent des personnages plus vrais que nature.