Le Poil de la bête : Entre chien et loup
Dans Le Poil de la bête, Philippe Gagnon mélange film d’époque, aventure et fantastique.
Dès le 18e siècle, on mentionne dans divers ouvrages la présence de loups-garous au Québec, notamment à Kamouraska. Dans son livre Créatures fantastiques du Québec, Bryan Perro répertorie d’ailleurs plusieurs légendes d’antan ayant trait à la lycanthropie.
Ce n’est donc pas sans précédent que Le Poil de la bête introduit des créatures mi-hommes, mi-loups dans une histoire se déroulant à l’époque de la Nouvelle-France. "C’est comme si Le Poil de la bête était la genèse de toutes les légendes québécoises. C’est pour ça que c’est important dans le film, le récit du père Brind’amour et l’idée de la tradition orale", explique le réalisateur Philippe Gagnon (Premier Juillet, le film, Dans une galaxie près de chez vous 2).
Conscient de la difficulté de réaliser un film de ce genre avec seulement 4,5 millions de dollars de budget, le cinéaste a néanmoins estimé possible de transposer à l’écran l’ambitieux scénario de Stéphane J. Bureau et Pierre Daudelin: "Je ne me suis pas fermé tout de suite en me disant que comme c’était écrit, on ne pouvait pas le faire, même s’il y avait des scènes qui étaient trop grosses. Ce que je voulais, c’était l’essence de ces scènes-là. Après, je pouvais réduire un peu."
Pour donner vie aux loups-garous du film, on a fait appel à plusieurs techniques: des maquillages, des costumes et, principalement, des effets visuels numériques conçus par la compagnie québécoise Hybride (300, Avatar, Predators). Gagnon n’a toutefois pas jugé nécessaire de maximiser la présence des bêtes à l’écran. Une question de coût, certes, mais aussi un choix artistique.
"Mes références, ce sont des films comme le premier Alien et Le Loup-garou de Londres, où tu crées un mystère. Je trouve ça beaucoup plus intéressant au plan dramatique que de montrer la "bébitte" tout de suite au début et sans arrêt par après. Pour moi, l’intérêt n’était pas là."
Le réalisateur visait plutôt à faire un long métrage où, outre le fantastique, on retrouverait aussi de l’aventure, de la romance, de l’humour et "des personnages plus grands que nature". Pour incarner ces derniers, il a fait appel à une impressionante distribution: "Je me suis fait une liste, avec Guillaume Lemay-Thivierge en partant. C’est mon producteur Réal [Chabot] qui m’a conseillé Viviane Audet et Mirianne Brûlé pour jouer les deux soeurs. Antoine Bertrand me semblait idéal pour le rôle de Vadeboncoeur, puis Michel Barrette, je le voyais tellement comme conteur!"
Gagnon poursuit: "Pour le reste, c’est beaucoup des gens avec qui j’avais déjà travaillé: Marie-Chantal Perron, Gilles Renaud, Sébastien Huberdeau et Martin Dubreuil sur Nos étés, Marie-Thérèse Fortin et Marc Beaupré sur des courts métrages… Et Patrice Robitaille vient du même coin de Québec que moi. C’est tout ça qui fait que j’ai réuni cette gang-là, puis je trouvais que ça faisait une belle brochette de faces!"
Si Le Poil de la bête trouve son public, deux suites pourraient voir le jour: "On est en train d’écrire le deuxième [Les Enfants de chienne] et on sait où s’en irait le troisième [La Mort aux dents]. Mais s’il ne devait y avoir que Le Poil de la bête, le film se tient", assure Gagnon.
À voir si vous aimez /
La Chasse-galerie, légendes canadiennes d’Honoré Beaugrand, La Grande Bataille d’Alain Chicoine, Le Pacte des loups de Christophe Gans
LE POIL DE LA BÊTE
Afin d’échapper à la pendaison, un bandit coureur de jupons (Guillaume Lemay-Thivierge, fringant) se réfugie dans une seigneurie où on le prend pour le père Brind’amour (clin d’oeil aux contes d’Honoré Beaugrand), jésuite chasseur de loups-garous. Si l’on ne peut rien reprocher à la réalisation de Philippe Gagnon, à la direction photo de Steve Asselin, à la direction artistique de David Pelletier et au jeu des acteurs (le suave Gilles Renaud en tête), on aurait beaucoup à redire du scénario. Souffrant d’un dialogue truffé de calembours peu inspirés et de blagues tombant à plat, le récit d’aventures offre peu de rebondissements, tandis que la romance entre le héros et une fille du Roy (gracieuse Viviane Audet) ne provoque guère l’émoi. Quant au volet horreur, ce n’est pas avec des combats filmés dans l’obscurité ou derrière une porte que l’on procurera quelques frissons au spectateur. (M. Dumais)