Image + Nation 2010 : Mille et une vies
Cinéma

Image + Nation 2010 : Mille et une vies

La 23e édition d’Image + Nation, doyen des festivals de films LGBT au Canada, fait la part belle aux portraits, documentaires ou non, et aux cinémas d’Espagne et d’Amérique du Sud.

Déplorons d’emblée l’absence de quelques films récents dont les fidèles d’Image + Nation se seraient régalés. Malheureusement, d’autres festivals se sont emparés de l’Homme au bain de Christophe Honoré, du Kaboom de Gregg Araki, du Mutantes de Virginie Despentes, de la Potiche de François Ozon, de L’Arbre et la Forêt d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau… Cela étant dit, la programmation de la 23e édition du doyen des festivals de films LGBT au Canada offre plusieurs raisons de se réjouir.

On remarque cette année de nombreux films à caractère biographique. Sur les écrivains Allen Ginsberg (Howl, de Rob Epstein et Jeffrey Friedman, avec James Franco), Hervé Guibert (Guibert cinéma d’Anthony Doncque) et Jaime Gil de Biedma (The Consul of Sodom de Sigfrid Monleon), le triumvirat Dali-Buñuel-Lorca (Little Ashes, de Paul Morrison, avec Robert Pattison) et Anne Lister, une contemporaine de Jane Austen que plusieurs considèrent comme la première lesbienne moderne (The Secret Diary of Miss Anne Lister de James Kent et The Real Anne Lister de Matthew Hill).

On se réjouit de voir La Folle Histoire d’amour de Simon Eskenazy, de Jean-Jacques Zylberman, la suite de L’homme est une femme comme les autres, toujours avec le charmant Antoine de Caunes; Le Refuge, de François Ozon, avec Isabelle Carré; Le Fil, de Mehdi Ben Attia, une sortie du placard sous le soleil tunisien, avec l’irrésistible Salim Kechiouche et la mythique Claudia Cardinale; sans oublier L.A. Zombie, le nouvel opus du controversé Bruce LaBruce, avec nul autre que François Sagat.

Mundo Hispanico

Pas moins de 11 longs et courts métrages de la cuvée 2010 proviennent d’Amérique du Sud ou d’Espagne. À commencer par le film d’ouverture, qui, cette année, il faut le souligner, s’avère digne de l’honneur qu’on lui accorde. Il se pourrait même que le premier long-métrage du Péruvien Javier Fuentes-León, Undertow (Contracorriente), soit cette année dans la course à l’Oscar du Meilleur film en langue étrangère. Avec sa direction photo soignée, ses acteurs convaincants et son intrigue teintée de réalisme magique, un récit qui n’est pas sans évoquer Brokeback Mountain et Ghost, le film est tout simplement poignant. La beauté des paysages n’a d’égale que le tragique de l’histoire d’amour impossible entre Miguel et Santiago.

Plan B, de l’Argentin Marco Berger, est moins réussi. Un triangle amoureux cousu de désir, mais surtout de mensonges et de trahisons. Pour se venger de Laura, son ex, Bruno entreprend de séduire Pablo. Rien de bien original. À vrai dire, le petit jeu – où est bien pris celui qui croyait prendre – est plus lassant qu’autre chose. Il est aussi un film, états-unien celui-là, qu’on ne saurait recommander: Handsome Harry, de Bette Gordon, une histoire d’amour impossible entre deux marins, un film fastidieux, à l’intrigue prévisible, qui n’est malheureusement pas sauvé par les comédiens talentueux que sont Steve Buscemi, Aidan Quinn et Campbell Scott.

D’une horrible beauté

Alors que l’horreur y a souvent été fort bien représentée, il n’y a pour ainsi dire pas de films de genre cette année à Image + Nation. Peu de films canadiens aussi. Heureusement qu’il y a L.A. Zombie, de Bruce LaBruce. Après Otto; Or, Up With Dead People, un long-métrage aussi gore que militant, le réalisateur ontarien donne un film d’art, syncopé, presque muet, où giclent des litres de sang. Aussi crues et parfois même dégoûtantes soient-elles, les images sont aussi, souvent, d’une grande beauté. Dans la peau d’un zombie qui prend un malin plaisir à redonner vie aux morts en se servant de son gigantesque organe, l’acteur porno François Sagat (aussi à l’affiche du plus récent Christophe Honoré) fascine.

Au rayon documentaires

Du côté des documentaires, on s’intéresse au cinéma porno gai en Tchécoslovaquie avec All Boys, de Markku Heikkinen, à la représentation des gais et lesbiennes dans les médias avec Fierté gay, de Sylvain Desmille, aux Soeurs de la perpétuelle indulgence, un organisme engagé à défendre des rapports sexuels protégés, les droits des gais et l’art de la performance, avec The Sisters, de Manfred Hoschek, à un dynamique trio de lesbiennes dans le contexte mouvementé de l’après-guerre avec Amorous, Antiquated, Audacious, de Katharina Lampert et Cordula Thym, à la polarisation homo/hétéro avec La Bisexualité: tout un art?, de Laure Michel et Éric Wastiaux, et finalement à la culture bear avec BearCity de Doug Langway.

Du 28 octobre au 7 novembre
Au Cinéma Impérial, à l’Université Concordia, à la Grande Bibliothèque et au Goethe-Institut
www.image-nation.org