FNC / Devil’s Knot : Au coeur de l’horreur
Film coup de poing, Devil’s Knot d’Atom Egoyan relate un tragique fait divers ayant bouleversé l’Amérique en 1993.
Drame judiciaire inspiré du livre de Mara Leveritt, Devil’s Knot : The True Story of the West Memphis Three, le nouveau long métrage d’Atom Egoyan nous replonge dans l’horreur qu’ont vécu les familles des trois garçons de huit ans sauvagement assassinés en mai 1993, à West Memphis, Arkansas, et l’injustice dont ont été victimes trois adolescents accusés d’avoir commis ces crimes jugés satanistes.
« La communauté avait besoin de coupables devant un acte si terrible, expliquait le cinéaste rencontré au Festival International du Film de Toronto. Pour ces gens, il s’agissait d’un acte démoniaque; ils étaient persuadés que le diable était parmi eux. Les enquêteurs ont donc fait en sorte de trouver chez ces jeunes l’incarnation du diable. C’est dans la nature humaine de vouloir des réponses et devant des meurtres aussi brutaux, il fallait une réponse rapide puisqu’il était impossible pour eux de vivre sans réponses. »
Alors qu’il existe déjà quatre documentaires sur le sujet, dont l’excellent West of Memphis d’Amy Berg, Egoyan s’est tourné du côté de la fiction pour explorer l’horrible fait divers : « Je crois que mon film apporte une certaine ambiguïté à cette histoire, alors que les documentaires, qui traçaient les portraits des accusés, ont eu pour effet que nous n’oublions jamais ce qu’ils ont subi. En me penchant sur les faits, j’ai eu envie d’explorer toutes les avenues qui n’avaient pas été empruntées, tous les êtres qui n’avaient pas été soupçonnés. La fiction nous permet d’interpréter de cette façon, de fouiller le principe du doute. Comment pouvons-nous vivre avec celui-ci sans jamais trouver de réponse à nos questions? »
Centré autour des personnages de Pam Hobbs (Reese Witherspoon, déchirante), mère de l’un des gamins, et de Ron Lax (Colin Firth, juste), détective privé ayant offert aux trois accusés de prouver leur innocence en révélant les faiblesses et les erreurs de l’enquête des policiers, Devil’s Knot rend compte avec un souci d’authenticité admirable ce fait divers qui a bouleversé l’Amérique.
« Il y a une essence quasi surnaturelle dans ces meurtres puisqu’aucune preuve n’a été trouvée sur les lieux du crime. À travers les personnages de Reese et de Colin on se rend compte qu’il n’y a pas nécessairement de réponses à toutes nos questions », avance le cinéaste.
Revisitant des thèmes abordés dans Exotica et The Sweet Hereafter, Egoyan livre sans doute l’un de ses films les plus conventionnels. De fait, on peine à reconnaître la signature du cinéaste canadien, qui s’acquitte pourtant honorablement de sa tâche. Ainsi, le premier acte de Devil’s Knot n’est pas sans rappeler Mystic River de Clint Eastwood avec son atmosphère tendue et ses scènes crève-coeur. Toutefois, force est de se demander si, à l’instar de West of Memphis, il était nécessaire de montrer les cadavres des enfants, si ces images insoutenables servent vraiment à la compréhension de l’horreur…
Le 20 octobre, à 18h, au Cinéma Impérial.