FIFA / Van Horne & Waverly : Pôle créatif
Autour de trois artistes oeuvrant dans le Mile End, Geneva Guérin tente de découvrir le rôle que le quartier, ses résidents et son atmosphère ont joué dans la création de leur corpus.
Présenté au FIFA cette année, le plus récent documentaire de Geneva Guérin observe trois artistes dans leur milieu naturel, le quartier du Mile End. Conspué par certains, prisé par d’autres, ce petit quartier montréalais est reconnu pour sa récente gentrification, certes, mais surtout pour abriter la plus grande concentration d’artistes au Canada.
Inspirant pour plusieurs, havre de paix et terreau fertile de création, ce quartier coincé au centre de l’île est le lieu de travail du sculpteur Glen Lemesurier, du musicien, réalisateur et performeur Radwan Ghazi Moumneh, et de la peintre Rouge Lefebvre. Autour de ces trois artistes et personnages, Geneva Guérin établit la toile et la carte des inspirations que le Mile End a provoquées. On y croise la voie du chemin de fer qui délimite le quartier au nord et le long de laquelle Lemesurier installe certaines de ses plus récentes oeuvres. On y retrouve aussi le Jardin du crépuscule, petit parc non homologué et fréquenté par tous, situé sur un terrain de la ville à la frontière nord du quartier, où Lemesurier a posé des oeuvres depuis 1999. On y découvre le mythique studio d’enregistrement Hotel2Tango, où travaille Radwan Moumneh avec des musiciens tel que Jason Sharp et Sarah Pagé. Enfin, on se retrouve dans l’atelier de Rouge Lefebvre, peintre et artiste conceptuelle.
Si l’univers de Glen Lemesurier – "le Gaudi du quartier" – semble étrangement lié au quartier et à son passé industriel, il est aussi bien implanté dans l’imaginaire des résidents du Mile End qui acceptent d’accueillir les sculptures métalliques de l’homme originaire d’Ontario. C’est par Lemesurier que l’on croisera Radwan Moumneh, originaire de Beyrouth et des États-Unis, fondateur du groupe Jerusalem in my Heart et copropriétaire de l’Hotel2Tango. C’est aussi par l’entremise du sculpteur que le spectateur est invité dans l’atelier de Rouge Lefebvre (Rouge Art) qui s’est extirpée de Saint-André-d’Argenteuil pour migrer vers Montréal et laisser libre cours à sa passion et à ses créations conceptuelles.
Bien que le traitement documentaire soit d’une grande honnêteté, un questionnement sur le choix des intervenants survient. L’univers de Lemesurier paraît de loin plus étroitement lié au quartier artistique que ceux des deux autres artistes interrogés. Consacrer autant de temps à Radwan et Rouge paraissait simplement justifier la longueur du documentaire, plutôt que de permettre de saisir réellement l’importance du quartier dans leur art. Un portrait plus global de Lemesurier et des créateurs qui l’entourent aurait permis de mieux circonscrire le propos. Enfin, oui, on découvre leurs univers, mais celui de Glen Lemesurier invitait beaucoup plus à comprendre le foisonnement artistique du Mile End, les repaires et ateliers dans les bâtiments post-industriels du coin Van Horn et Waverly, ou encore les origines du Jardin du crépuscule, créé par Lemesurier lui-même. Soulignons les interventions très pertinentes du conseiller municipal de Projet Montréal Richard Ryan qui apporte une vision plus institutionnelle, économique et politique de ce quartier artistique foisonnant.
Enfin, on peut toujours visionner le documentaire sur le site de la CBC et découvrir la personnalité attachante de Glen Lemesurier, tout en retraçant les origines des sculptures métalliques qui marquent le Mile End d’un bord à l’autre.