Un royaume déménage : Je me souviens
Un documentaire qui observe de façon posée, feutrée et discrète le déménagement de la communauté des sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc. Un bijou.
Force est de constater que le monde qui est dépeint dans ce sublime court métrage réalisé par Raphael Dostie et Terence Chotard, est révolu. Le royaume qui déménage dans ce film, qui a gagné le prix du meilleur documentaire à Regard sur le court, est celui d’une toute petite communauté de 82 sœurs qui ont unanimement choisi de changer de décor. C’est cette transition qu’ont filmée les deux jeunes cinéastes.
Cette disparition progressive des objets ponctuant le quotidien de ces femmes de Dieu est filmé avec une acuité et une retenue presque religieuse par le chef opérateur Ménad Kasraoui. En faisant le choix de ne pas faire parler les sœurs à la caméra et de ne pas avoir de narration directe, les réalisateurs ont témoigné de façon juste du quotidien et de la routine d’une communauté aux images aujourd’hui inexistantes.
Les moments où la caméra fixe les visages et le passage du temps sur ceux-ci sont particulièrement touchants. La blancheur immaculée de cette sœur qu’on voit se coiffer le matin témoigne encore d’un monde qui s’achève et s’éteint. Le tandem Dostie-Chotard réussit à nous transpercer le cœur en faisant se succéder une scène de lit de mort avec des images de l’excavation du cimetière des sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc, un moment d’une cruelle poésie.
Ajoutez à ce court-métrage, une conception sonore forte assurée par Frédéric Cloutier et vous avez un documentaire parfait pour précéder le chef d’œuvre de Joshua Oppenheimer, The Look of Silence.
Un regard tendre et artistique sur un passé pas si lointain que cela.
En salle, précédant The Look of Silence, dès le 24 juillet, au Cinéma du Parc.