Tom of Finland : C’est un revolver dans ta poche ou t’es juste content de me voir ?
Tom of Finland, de son vrai nom Touko Valio Laaksonen, a légué une œuvre considérable mais que peu de gens connaissent. Le sujet, déjà, en fait encore frémir plusieurs: des hommes hyper-musclés, souvent vêtus de cuir, avec des membres gros comme des pattes de chaises. Lieu commun, direz-vous? Ce l’est devenu, certainement. Audacieux? Avec toute la diversité qu’offre la pornographie d’aujourd’hui, pas vraiment. Mais lorsqu’on se reporte au contexte dans lequel ces dessins artistico-pornographiques ont été faits, on comprend davantage leur aplomb, de même que le rôle de catalyseur qu’ils ont pu jouer dans le développement d’un imaginaire collectif et d’une affirmation de soi. Le réalisateur Dome Karukoski s’intéresse donc au parcours atypique du dessinateur finlandais, dont l’œuvre emblématique continue de fasciner aujourd’hui.
De combattant pendant la Seconde Guerre Mondiale à artiste polémique, son parcours est montré de manière touchante. Car il s’agit bien d’un biopic. La direction artistique est impeccable et surtout, le climat d’oppression que ressentent constamment les homosexuels de l’époque est présenté de manière juste et sensible. Ainsi, si certains ont pu taxer l’œuvre de Tom de simple prétexte masturbatoire, d’autres commencent à y voir une forme d’art audacieuse, une manière de jouer avec les clichés qui deviendront légion dans la communauté gaie. C’est véritablement à partir du moment où il voyage en Californie et qu’il se met à exposer ses dessins et à publier son travail que sa notoriété grandit, de même que sa collection de comics, Kake.
Cela dit, le reproche que l’on pourrait faire au film réside dans sa facture, trop polie et trop propre, considérant le sujet. On voit à peine quelques plans fugaces des dessins et esquisses de Tom et les scènes de sexe demeurent très proprettes. Bref, on suggère plutôt qu’on montre. En même temps, on peut comprendre le désir de témoigner d’une certaine pudeur étant donné le contexte répressif dans lequel évoluait l’artiste, mais considérant le sujet, le traitement aurait pu être davantage assumé. Après tout, son œuvre a largement été répandue par la suite; Taschen publiant même plusieurs rétrospectives et numéros thématiques. Au final, Tom of Finland demeure un biopic convaincant et nécessaire, qui parvient à allier le dessein d’un artiste à celui d’une communauté tout entière. Il constitue un autre exemple qui contribue à redéfinir l’image du festival Fantasia, en sortant du film proprement de genre.
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