Cinéma

Les frères Seaborn : Gens batailleurs

Les frères Jean-Laurence et Jonathan Seaborn vont au front avec un documentaire environnementaliste qui écorche le port et le maire de Québec. C’est l’autopsie des proverbiales poussières rouges de Limoilou, le portrait reluisant de la militante Véronique Lalande.

Indiscutablement politique, la courte filmographie des frères Seaborn penche à gauche et place le citoyen écorché au premier plan. Après avoir tendu un micro aux toxicomanes de la capitale (Pas de piquerie dans mon quartier), le duo s’attaque à la brumeuse question de la pollution atmosphérique en Basse-Ville. Un sujet qui a fait les manchettes avant de sombrer dans l’oubli relatif, un débat que les cinéastes réaniment avec ce nouveau thriller-réalité plutôt enlevant.

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Bras de fer, c’est le titre du long métrage, pose une caméra sur Véronique Lalande et son amoureux Louis Duchesne. Une porte-parole éloquente et un scientifique de profession qui ont élevé la voix contre le port de Québec et la compagnie Arrimage du Saint-Laurent. Les David d’un combat perdu d’avance, des étoiles filantes dans notre paysage médiatique local. Ce film raconte leur quête de justice au nom de tous les citoyens de Limoilou, dont Jean-Laurence et son frère font partie. «Ce n’est pas un projet qu’on a choisi, ça nous est tombé dessus. L’histoire est assez drôle, c’est vraiment une histoire de quartier. Je me promenais sur la piste cyclable avec mes enfants et ma femme, puis j’ai croisé Véronique après le premier épisode de poussière rouge. […] Elle avait son bébé dans un bras, les pamphlets dans l’autre main. Elle m’a vraiment beaucoup inspiré.»

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La rencontre fut déterminante. Dès lors, le vidéaste entreprend de tourner coûte que coûte et de forcer son frangin à le suivre dans l’aventure. «J’ai pas écrit un film pour le déposer à une station de télé ou à un distributeur et chercher du financement après ça. J’ai plutôt pris le téléphone, j’ai appelé Jonathan et je lui ai dit: “Charge les batteries, prépare le kodak, on a une bataille à mener avec d’autre monde!”» Pendant quatre ans, les Seaborn ont suivi leurs voisins jusque dans leur cuisine, jusque dans les moindres recoins de leur intimité.

Ils vécurent heureux (quand même)

L’histoire, on la connaissait déjà: Véronique et Louis ont posé leur pied sur le frein. Le couple a choisi de déménager parce que rien n’a changé, parce que les métaux lourds continuent d’être poussés par le vent. De fines particules de nickel qui ont pourchassé Jonathan jusqu’à l’étape de postproduction à l’été 2017. «J’habite sur la 3e Avenue, au troisième étage. Le micro n’avait pas bien enregistré la scène de Louis qui ramassait de la poussière sur son bord de fenêtre. Donc je suis sorti dehors, sur mon bord de fenêtre, et j’ai refait le bruitage avec la matière originale.»

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Autrement que pour cette petite tricherie sonore, ou pour la colorisation verdâtre qui symbolise l’espoir, un choix réfléchi, les réalisateurs clament que «rien n’a été stagé». Exempt d’une fin heureuse, Bras de fer est un film cru et sans flaflas esthétiques. C’est un document désarçonnant qui nourrit le cynisme, mais qui fera peut-être trembler quelques géants.

Bras de fer
Du 9 au 16 mars au Cinéma Le Clap

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