Karine Vanasse : porter les émotions
Cinéma

Karine Vanasse : porter les émotions

Pour les dix ans de sa marque de vêtements, Elisa C-Rossow a organisé un joli projet: photographier dix femmes représentant Montréal, pour honorer ses collections et célébrer la ville. Entrevue avec l’une d’elles, l’actrice Karine Vanasse.

La toute jeune Karine curieuse et allumée des émissions jeunesses des années 1990 a parcouru du chemin en vingt ans de carrière. Elle a incarné des personnages qu’on a aimés et qu’on a aimé détester. Revenge, Pan Am, Polytechnique, Séraphin, 30 vies, Blue Moon, De père en flic ou encore Cardinal ne sont que quelques-unes des réalisations de son cursus plus que garni.

Elisa C-Rossow: Tu es maman depuis quelques mois. Quel est ton souhait le plus cher pour ton enfant?

Karine Vanasse: Je lui souhaite d’avoir une curiosité sans fin, d’avoir envie d’aller au devant et au-delà de ses capacités. Je lui souhaite d’avoir une base solide vers laquelle il pourra toujours revenir pour vivre sa vie en étant bien ancré dans ses valeurs.

Quel est le meilleur conseil que tu aies reçu?

Simplement ces mots: «La recherche personnelle est indépendante de la vérité».

Le meilleur conseil que tu donnerais?

Tenter par tous les moyens de s’éloigner de la médisance. Mon dieu que l’on peut perdre son temps avec ça…

Crois-tu qu’interpréter des personnages au quotidien influence ta vie?

Tout dépend vraiment du personnage et de l’intensité du tournage. Il m’est arrivé quelques fois de me laisser imprégner de l’énergie des personnages un peu plus qu’à mon habitude… Le jeu, c’est bel et bien de passer de sa vie à celle de l’autre, qu’on explore avec le plus d’agilité possible. S’entourer d’une famille de créateurs qu’on aime, qui nous ressemblent et surtout qui comprennent notre univers nous permet d’exprimer notre essence comme interprète, même si on est au service de l’histoire d’un réalisateur.

À quel moment as-tu réalisé que tu étais à la bonne place comme actrice?

J’avais 17 ans, j’étais comédienne depuis quelques années déjà. Le jeu n’avait pas encore été un choix conscient. J’ai cet hiver-là obtenu une bourse pour participer pendant cinq mois à un programme d’études en Grèce. En plus des cours, je travaillais dans une pâtisserie où la femme du propriétaire vivait régulièrement des épisodes de violence conjugale. Devant nous, rien n’était caché. Je me retrouvais souvent durant nos pauses dehors, à l’écoute de sa réalité, de ses peines, sans trop savoir comment réagir. Je la sentais prise, prisonnière.

Quand je suis revenue au Québec et que j’ai obtenu le rôle de Donalda pour le film Un Homme et son péché, je sentais que je portais quelque chose de différent en moi qui me permettait de mieux porter la réalité de ce personnage. Elle partageait beaucoup avec cette femme rencontrée en Grèce… C’est à ce moment que j’ai réalisé concrètement que ce métier d’actrice ne servirait pas seulement à mettre mes capacités en valeur, mais bien à incarner la réalité des autres. Savoir que je pourrais porter ces sentiments qui semblent pourtant appartenir à d’autres et offrir ce miroir au public.

Quels qualificatifs donnerais-tu à ces éléments de ton univers? Le jeu, l’art, le design, la mode…

Le jeu, c’est la rencontre. Plus jeune, j’étais la fille introvertie et le jeu m’a réellement permis d’aller à la rencontre des autres, de mes personnages, de l’humain, finalement. L’art, le design et la mode, c’est se laisser emporter par cette rencontre. Rien n’est plus beau que de se laisser guider dans l’univers d’un artiste et de se laisser surprendre par l’émotion qu’il provoque en nous.

Ta plus belle histoire d’amour?

La relation avec ma mère. Ça a évidemment le potentiel d’être une relation complexe pour tout le monde, je crois. Avec du recul, je suis heureuse d’avoir vécu toutes ces vagues, elles ont réellement forgé la relation que nous avons aujourd’hui. Je dirais même que l’histoire d’amour avec ma mère a eu des répercussions directes sur mes autres relations d’amour, qu’elles soient amicales ou amoureuses.

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