BloguesClémence Risler

Le Pop se recueille

J'avoue: bien minces sont les chances que je mette les pieds dans l'une des nombreuses églises qui s'élèvent dans notre paysage urbain. Pourtant, c'est dans l'une d'elles que j'ai passé une partie de la soirée d'hier: à l'église Saint-Jean-Baptiste sur la rue Rachel. La raison: Gonzales y inaugurait le festival. Je ne l'avais pas vu en clôture du Pop l'an dernier, ni au Festival de jazz cet été. Avec grand regret d'ailleurs, puisqu'amis et collègues m'avaient relaté les deux prestations du pianiste en ne tarissant pas d'éloges. Je m'attendais donc à une sorte de révélation. Est-ce en raison de mes attentes démesurées si j'ai été déçue hier soir? Je ne crois pas.
Pour ce concert spécial à l'orgue, en plus d'interpréter des extraits de ses propres pièces, Gonzo pique dans un large répertoire, passant de Frère Jacques
au Iron Man
de Black Sabbath. Il déconstruit les titres, exécute moult variations sur ces thèmes. Oui, il nous fait la démonstration que la ritournelle enfantine peut, sous ses doigts, prendre des airs menaçants et que le classique originalement interprété par Ozzy et sa bande peut se faire guilleret. Mais l'exercice de style reste un exercice de style. Cela demeure un peu froid. Malgré son évident talent (faut quand même le faire, manier cet engin avec tous ses boutons et ses quatre rangées de touches), il n'a pas réussi à faire vibrer ce lieu si grandiose, pas plus que les centaines de personnes flanquées devant l'écran sur lequel était projetée la prestation. On nous avait parlé d'un artiste à la présence drôle et charismatique. chose que nous n'avons pas pu constater.

Le guitariste émérite Gary Lucas assurait la première partie avec une création présentée à plusieurs reprises depuis des années et déjà vue, pour ma part, au Festival d'été de Québec il y a quatre ans. Sur le même écran dressé au niveau du jubé, était présenté The Golem
, film d' «épouvante» allemand de 1921 inspiré d'une légende juive. Le musicien, membre de Gods and Monsters et ayant collaboré avec des artistes tels que Captain Beefheart, Jeff Buckley, Lou Reed, John Cale et Nick Cave se tenait assis face à la projection et créait la trame sonore rendue inquiétante par des effets de distorsion et de résonance.

Après Gonzales, direction La Tulipe où je suis arrivée juste à temps pour attraper la dernière chanson du duo féminin français Mansfield TYA
. Guitare et violon en main, les deux musiciennes semblaient un peu perdues sur la grande scène, mais on su livrer leur rock à fleur de peau avec une intensité digne des premiers albums de Cat Power.

Puis, s'ensuivi le plus beau moment de cette soirée. Un moment empreint de simplicité et de douceur. La prestation de Vashti Bunyan
. Accompagnée de cinq musiciens alignés à ses côtés au devant de la scène, la dame nous livre toute sa vie à travers ses airs de folk pastoral. Avant d'interpréter ses chansons, elle prend le temps de les présenter, explique dans quel contexte elles ont été écrites, pour qui ou pourquoi.
Cette fois-ci, l'émotion était bel et bien au rendez-vous.