Dans l'édition du Voir de la semaine dernière, j'écrivais un tout petit texte sur l'implantation de sites MySpace au Canada. Si pour certains, ces pages web représentent de merveilleuses occasions de découvrir de nouveaux artistes, ils ne font pas du tout l'unanimité. À ce sujet, lire les commentaires fort intéressants émis par des lecteurs en réaction à la nouvelle.
Puisque vous me tendez une perche, Clémence, je saute évidemment sur l’occasion. Si ça peut permettre une discussion sur le sujet, tant mieux ! Je fais partie de ces rares personnes encore qui ne voient pas du tout d’un bon oeil cet engouement incroyable qui entoure MySpace. Qu’on se comprenne : que ça permette à des musiciens de se faire connaître est une excellente chose, mais ce qu’il y a derrière tout ça devrait inquiéter ses membres qui ont tendance à être aveuglés par l’effet de mode sans se soucier du reste.
Je profite de la tribune que vous ouvrez là pour recopier ce que j’ai déjà écrit ailleurs, ça fera peut-être comprendre davantage pourquoi je crache ainsi sur MySpace… Et ça ouvrira peut-être enfin le débat…
Je m’adresse aux musiciens qui ont une page MySpace. Êtes-vous conscients que le milliardaire Rupert Murdoch, patron de MySpace, empoche 30 millions de dollars par MOIS par la publicité grâce à la richesse du contenu de vos pages ? Et que vous donne-t-il en échange ? Rien d’autre que la possibilité de créer un site gratuitement. Est-ce vraiment ça, l’avenir que vous souhaitez pour les musiciens ? Vous faire exploiter par l’industrie des technologies comme vous l’êtes déjà par l’industrie du disque ?
MySpace vous proposera bientôt de vendre vous-mêmes vos chansons sur votre page. Murdoch empochera au passage 0,45 dollar par MP3 que vous vendrez, auxquels s’ajouteront des frais de gestion. Il ne tiendra alors qu’à vous d’accepter qu’un milliardaire s’enrichisse davantage sur votre dos, ou de décider enfin de vous associer entre artistes pour bâtir un nouveau mode de commercialisation de votre musique qui vous permettra de percevoir, VOUS, la plus grosse part des bénéfices.
Musiciens, c’est aujourd’hui que votre avenir se décide ! Et ça va très vite ! N’acceptez pas que des capitalistes prennent de l’avance sur vous en le créant en fonction de LEURS critères de rentabilité ! Ne soyez pas aussi aveugles que l’ont été vos maisons de disques il y a dix ans, quand Napster a ouvert grand la porte au piratage ! Jamais un empire comme MySpace, créé pour des raisons toutes autres que celles de vous rémunérer à votre juste valeur, ne saura vous offrir une alternative honnête. C’est à vous de vous battre pour édifier un nouveau système de distribution de votre musique, sans Murdoch, sans ces distributeurs qui empochent la plus grande part des revenus de la vente de vos disques. C’était impensable il y a 10 ans. C’est inévitable aujourd’hui !
L’industrie du disque cherche par tous les moyens à diaboliser le piratage et à le rendre responsable de la baisse des revenus des artistes. Mais si piratage il y a, c’est principalement parce que les consommateurs en ont ras-le-bol de payer cher la musique en sachant que leur argent va principalement dans les poches des distributeurs.
Nombreux sont ceux qui trouvent ainsi une justification au piratage en avançant avec raison qu’il nuit bien plus à l’industrie qu’aux artistes qui ne touchent de toute façon qu’un trop maigre pourcentage sur la vente de leurs disques. Vous associer à l’industrie des technologies pour vous faire exploiter autant qu’avec l’industrie du disque n’incitera pas les internautes à acheter votre musique, bien au contraire ! Alors qu’en créant un système de distribution de la musique géré par et pour les artistes, vous sauriez convaincre une grande partie de ceux qui téléchargent illégalement vos chansons de payer pour les avoir. Je n’ai pas de solution miracle à vous proposer.
Mon message n’a d’autre but que celui de vous ouvrir les yeux, de vous inviter à engager le dialogue avec d’autres musiciens au lieu de foncer aveuglément dans les pièges de l’industrie des technologies qui endort votre vigilance ! Jamais plus peut-être vous n’aurez une occasion pareille de vous battre pour faire respecter vos droits ! L’industrie du disque vacille depuis quelques années. Vous avez enfin la possibilité de vous passer d’elle sous sa forme actuelle grâce à ce formidable outil de promotion et de diffusion qu’est Internet. Sachez l’utiliser à bon escient ! Vous pourriez bâtir votre propre communauté virtuelle, entre artistes, qui n’enrichira que ceux qui méritent vraiment de l’être grâce à VOTRE travail, VOUS !
Ce qui me traumatise, c’esy l,autre message sur le fait que Murdoch s’approprie tous les journaux anglophones et qu’il est lié d’amitié avec le président Bush…déjà que la désinformation fait rage aux USA, ça peut devenir catastrophique si en plus, le pote à Bubush est celui qui filtre l’information.
Bienvenue en enfer.
Murdoch ne s’en tient pas là. Non seulement il tente de racheter le Wall Street Journal, mais il souhaite également faire de MySpace LA PRINCIPALE source d’information sur Internet en intégrant MySpace News aux millions de pages des membres de cette communauté virtuelle. J’avais écrit un article sur le sujet pour Québec Micro il y a quelques jours. J’y expliquais entre autres ceci :
« L’autre as que Rupert Murdoch vient de sortir de son jeu fera directement concurrence à Google News. MySpace News n’en est certes qu’à sa version bêta, son interface n’a rien de révolutionnaire, mais le fait qu’il mettra en valeur les informations qui circulent sur les blogues des MySpaciens risque fort d’en faire rapidement la source incontournable pour des millions d’internautes. Proposé en anglais seulement pour le moment, MySpace News puise aussi sa matière sur les sites des journaux appartenant à News Corporation dont Rupert Murdoch est le patron. De là à craindre que le site d’information qui détrônera peut-être Google News puisse manquer parfois de transparence, il n’y a qu’un pas que l’avenir nous invitera à franchir ou non. »
De plus, MySpace est aussi sur le point de racheter PhotoBucket, un site de partage d’images très populaire qui attire 18 millions d’internautes par mois. Le prix proposé par Murdoch serait pour l’instant de 300 millions de dollars. Puisque MySpace lui procure plus de 30 millions de dollars en revenus publicitaires par MOIS, il a les moyens de racheter tout ce qui lui assurera bientôt une domination écrasante sur l’industrie liée à Internet.
Et pendant ce temps-là, 170 millions d’internautes s’amusent à « fraterniser » sur MySpace… Et les musiciens en sont ravis eux aussi. Ils offrent 30 millions de dollars par mois à Murdoch sur un plateau d’argent, mais ils sont heureux de pouvoir se créer LEUR MySpace en quelques clics. Combien d’entre eux sont conscients de foutre en l’air leur avenir commun par aveuglement ?